CAA de MARSEILLE
N° 16MA02942
Inédit au recueil Lebon
5ème chambre – formation à 3
M. BOCQUET, président
M. Laurent MARCOVICI, rapporteur
M. REVERT, rapporteur public
lecture du lundi 14 mai 2018
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure devant la Cour :
I – Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016 sous le n° 16MA02942, et un mémoire en communication de pièces du 5 décembre 2016, la SCI Palmyra, représentée par la SCP d’avocats CGCB et associés, demande à la Cour :
1°) de condamner l’Etat au paiement de 7 101 754 euros, majorés des intérêts au taux légal à compter de l’introduction de la requête, au titre de l’indemnisation du préjudice subi ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– la cour administrative d’appel de Marseille est compétente ;
– la décision de rejet est illégale ;
– l’illégalité de la décision de la CNAC du 23 avril 2014 constitue une faute ;
– le lien de causalité est établi.
Une mise en demeure a été adressée le 23 janvier 2018 à la CNAC et au ministre de l’économie.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
-le code de justice administrative ;
-le code de commerce.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Marcovici,
– les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
– et les observations de MeA…, représentant la société Palmyra.
Une note en délibéré présentée par la scp d’avocats CGCB et associés a été enregistrée le 24 avril 2018.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Palmyra demande la condamnation de l’Etat à réparer les conséquences dommageables de l’illégalité de la décision de la Commission nationale de l’aménagement commercial du 23 avril 2014 qui a refusé de lui accorder une autorisation d’exploitation commerciale.
2. La SCI Palmyra a demandé l’autorisation de procéder à la création à Châteauneuf-les-Martigues (Bouches-du-Rhône) d’un ensemble commercial d’une surface de vente de 3 268 m² constitué d’un supermarché à l’enseigne Lidl de 1 268 m², de trois magasins spécialisés dans l’équipement de la personne présentant une surface totale de vente de 765 m² et d’une moyenne surface non alimentaire et non spécialisée de 1 235 m². Si la commission départementale d’aménagement commercial des Bouches-du-Rhône a accordé cette autorisation par décision du 13 décembre 2013, la Commission nationale d’aménagement commercial, saisie d’un recours, a refusé d’accorder cette autorisation par décision du 23 avril 2014. Par un arrêt n° 14MA03629 du 2 juin 2015 devenu définitif, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé cette dernière décision en raison du caractère erroné de chacun des motifs de la commission nationale. L’illégalité de la décision du 23 avril 2014 est constitutive d’une faute susceptible d’engager la responsabilité de l’Etat.
3. Il résulte de l’instruction que la société Palmyra a conclu une promesse de bail à construction avec la SNC Lidl, ainsi qu’un bail commercial avec la SARL Espanet Finances. Les deux contrats étaient soumis à des conditions suspensives relatives notamment à l’obtention d’une autorisation d’exploitation commerciale.
4. En premier lieu, il ne résulte pas de l’instruction que l’abandon du projet de la SARL Espanet Finances résulterait de la faute qu’invoque la société Palmyra, tenant à l’illégalité de la décision du 23 avril 2014, dès lors que cette décision ne concerne aucun projet de la SARL Espanet. La société Palmyra n’établit donc l’existence d’aucun lien direct et certain de causalité entre la faute qu’elle invoque et les préjudices dont elle se prévaut.
5. En second lieu, il résulte de l’instruction, et notamment de la promesse de vente du 23 décembre 2013 et du courrier de la société Lidl du 13 juin 2014 que l’abandon de son projet résulte de deux causes distinctes, à savoir le refus opposé par la CNAC à la réalisation de son projet, et le recours dirigé contre le permis de construire modificatif déposé le 17 avril 2014 par M.B…. La promesse de bail à construction conclue entre la société Lidl et la société Palmyra comprenait une clause suspensive, selon laquelle le permis de construire modificatif devait être devenu définitif, et purgé de tout recours, condition qui n’était pas remplie à l’expiration de la promesse de vente, quant bien même le recours contentieux de M. B… aurait été rejeté ultérieurement par le tribunal administratif de Marseille en raison de son irrecevabilité manifeste au mois de janvier 2015. Ainsi, les pièces du dossier ne permettent pas d’établir un lien direct et certain entre l’illégalité invoquée de la décision du 23 avril 2014, et l’abandon du projet, qui, en tout état de cause ne pouvait être réalisé, dès lors que la condition tenant à l’obtention d’un permis modificatif, purgé de tout recours, n’était pas réalisée.
6. Au surplus, en dépit de l’illégalité de la décision du 23 avril 2014, il n’est pas démontré que le projet n’était pas réalisable et que toutes les dépenses ont été exposées en pure perte. Par suite, les préjudices portant sur la perte de valeur de la construction à réaliser, sur le règlement des travaux de VRD, de la taxe d’aménagement ou de la redevance archéologique invoqués ne peuvent être regardés comme établis. Par ailleurs, les préjudices liés à la non-exécution de la promesse de bail consentie à la société Centrakor et à la non-perception des loyers ne peuvent être davantage accueillis en l’absence de tout élément au dossier portant sur le comportement du bénéficiaire de la promesse.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de la société Palmyra ne peut qu’être rejetée, y compris la demande formulée sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Palmyra est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Palmyra, au ministre de l’économie et la Commission nationale d’aménagement commercial.
Copie en sera délivrée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l’audience du 23 avril 2018, où siégeaient :
– M. Bocquet, président,
– M. Marcovici, président assesseur,
– Mme Marchessaux, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 mai 2018.
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