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Servitude de passage sur le Littoral : comment organiser une visite des lieux en cas de modification de la servitude ?

« Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI Les Mouettes du Bois Marin, la SCI la Tourmentine, M. DCet la société Les Essarts Property Limited ont demandé au tribunal administratif de Rennes d’annuler l’arrêté du 4 février 2015 par lequel le préfet d’Ille-et-Vilaine a approuvé le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Briac-sur-Mer.

Par un jugement n° 1501551 du 15 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté du 4 février 2015 en tant qu’il porte sur les parcelles cadastrées BA n° 121, 122, 129 et 130 et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 février 2018, 29 janvier 2019 et 3 avril 2019, la SCI Les Mouettes du Bois Marin, la SCI la Tourmentine et la société Les Essarts Property Limited, représentées par Me E, demandent à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 décembre 2017, uniquement en tant que ce jugement a rejeté cette demande d’annulation totale au-delà des parcelles cadastrées BA n° 121, 122, 129 et 130 ;

2°) d’annuler l’arrêté du 4 février 2015 par lequel le préfet d’Ille-et-Vilaine a approuvé le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Briac-sur-Mer ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

— la requête est recevable ;

— l’intervention volontaire des associations est irrecevable car elles ne justifient d’aucun intérêt distinct de l’Etat dès lors qu’elles défendent uniquement le rejet de l’arrêté préfectoral litigieux, ainsi que le fait l’Etat de son côté ;

— le jugement attaqué est irrégulier en raison d’omission à statuer s’agissant du moyen tiré de l’insuffisance de motivation de l’arrêté préfectoral modifiant la servitude ;

— le jugement n’est pas suffisamment motivé s’agissant de l’annulation seulement partielle de l’arrêté ; »

— le jugement est irrégulier dès lors qu’il ne vise pas le mémoire régularisé le 31 octobre 2017 par les exposants en première instance, en méconnaissance de l’article R. 741-2 du code de justice administrative ;

— le dossier soumis à enquête publique était insuffisant et comportait des erreurs ;

— l’arrêté attaqué n’était pas suffisamment motivé ;

— la méconnaissance des dispositions de l’article R. 160-18 du code de l’urbanisme justifiait une annulation totale de l’arrêté attaqué et les consorts Font été privés d’une garantie ;

— s’agissant de la propriétéC, aucun obstacle n’a été relevé par les auteurs du projet de servitude, susceptible de fonder une suspension ou une autre modification du tracé, alors pourtant que le passage de la servitude se trouve exactement à l’endroit de la piscine réalisée sur cette propriété, alors même qu’elle aurait été édifiée sans autorisation il y a près de vingt ans ;

— l’arrêté préfectoral est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation au regard des dispositions de l’article R. 160-12 du code de l’urbanisme ;

— l’arrêté préfectoral est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation au regard des dispositions des articles L. 160-6 dernier alinéa et R. 160-13 du code de l’urbanisme.

Par des mémoires en intervention enregistrés les 28 août 2018 et 15 mars 2019, l’association des amis des chemins de ronde d’Ille-et-Vilaine, l’association Dinard côte d’émeraude environnement et le cercle des amis de Saint-Briac et de la côte d’Émeraude, représentés par Me A, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge solidaire des requérants le versement d’une somme de 1 500 euros en application de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

— leur intervention est recevable ;

— les moyens tirés de la méconnaissance de l’article R. 741-2 du code de justice administrative, de ce que le dossier soumis à enquête publique était insuffisant et comportait des erreurs, de ce que l’arrêté préfectoral n’était pas suffisamment motivé et de la méconnaissance des articles R. 160-15, R. 160-12 et R. 160-18 du code de l’urbanisme doivent être écartés.

Par des mémoires en défense enregistrés les 28 novembre 2018 et 26 mars 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de la cohésion des territoires concluent au rejet de la requête en s’en rapportant au mémoire de première instance du préfet d’Ille-et-Vilaine.

Ils font valoir en outre que :

— le jugement n’est pas entaché d’une omission à statuer ;

— le juge des référés du tribunal a rejeté la requête présentée sur le fondement de l’article L. 521-3 du code de justice administrative ;

— par un arrêté du 19 décembre 2018, le préfet d’Ille-et-Vilaine a approuvé le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral sur les parcelles BA 121, 122 et 129 de la commune de Saint-Briac-sur-Mer.

Par une lettre enregistrée le 2 avril 2019, l’Association des Amis des Chemins de Ronde d’Ille-et-Villaine a été désignée par son mandataire, Me A, en qualité de représentant unique, destinataire de la notification de la décision à venir.

Par une lettre enregistrée le 3 avril 2019, la SCI les Mouettes du Bois marin a été désignée par son mandataire, Me E, en qualité de représentant unique, destinataire de la notification de la décision à venir.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’urbanisme ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Picquet,

— les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

— et les observations de Me E, représentant les requérants et de Mme Breprésentant le ministre de la cohésion des territoires.

Une note en délibéré présentée pour la SCI Les Mouettes du Bois Marin et autres requérants a été enregistrée le 10 juin 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 4 février 2015, le préfet d’Ille-et-Vilaine a approuvé le tracé de la servitude de passage des piétons le long du littoral de la commune de Saint-Briac-sur-Mer. La SCI Les Mouettes du Bois Marin, la SCI la Tourmentine, M. DCet la société Les Essarts Property Limited ont demandé au tribunal administratif de Rennes d’annuler cet arrêté. Par un jugement du 15 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté du 4 février 2015 en tant qu’il porte sur les parcelles cadastrées BA n° 121, 122, 129 et 130 et a rejeté le surplus de la demande. Les requérants font appel de ce jugement en tant qu’il a rejeté le surplus de leurs conclusions.

Sur l’intervention conjointe de l’association des amis des chemins de ronde d’Ille-et-Vilaine, l’association Dinard Côte d’Émeraude Environnement et le cercle des amis de

Saint-Briac et de la côte d’Émeraude :

2. Il ressort des pièces du dossier que ces trois associations justifient d’un intérêt suffisant au maintien de l’arrêté en litige dès lors que l’annulation de cet arrêté léserait de façon suffisamment directe leurs intérêts, au regard des missions qu’elles se sont données par leurs statuts. Par suite, leur intervention conjointe en défense, régulièrement présentée, est recevable.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, il ressort des écritures de première instance que le moyen tiré de l’insuffisante motivation de la décision attaquée n’était pas soulevé par les demandeurs. Dès lors, le jugement attaqué n’est pas entaché d’omission à statuer sur ce point.

4. En deuxième lieu, le jugement attaqué, après avoir accueilli un vice de procédure à ne pas avoir convoqué à la visite sur les lieux du commissaire enquêteur tous les indivisaires des parcelles cadastrées BA n°121, 122, 129 et 130, a indiqué que « ce moyen n’est toutefois susceptible d’entraîner l’annulation de l’arrêté en litige qu’en tant qu’il porte sur les parcelles pour lesquelles la visite des lieux a été irrégulièrement réalisée ». Contrairement à ce qui est soutenu, le tribunal n’avait pas à motiver de manière plus précise le caractère partiel de l’annulation.

5. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que le jugement est irrégulier dès lors qu’il ne vise pas le mémoire régularisé le 31 octobre 2017 par les demandeurs, en méconnaissance de l’article R. 741-2 du code de justice administrative, manque en fait et doit donc être écarté.

6. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l’article R. 160-18 du code de l’urbanisme alors en vigueur : « Le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête peut décider de procéder à une visite des lieux. Dans ce cas, le commissaire enquêteur ou le président de la commission avise le maire et convoque sur place les propriétaires intéressés ainsi que les représentants des administrations. Après les avoir entendus, il dresse procès-verbal de la réunion ». D’une part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, ces dispositions ont pour objet de permettre à chaque propriétaire intéressé de faire des observations pendant la contre-visite s’agissant de sa propriété et non pas des propriétés voisines. D’autre part, le principe de continuité du cheminement des piétons le long du littoral ne fait pas obstacle à une annulation partielle, en tant qu’elle porte sur certaines parcelles, d’un arrêté approuvant le tracé d’une servitude de passage des piétons le long du littoral. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la méconnaissance des dispositions de l’article R. 160-18 du code de l’urbanisme justifiait une annulation totale de l’arrêté attaqué et non pas une annulation partielle.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe :

7. En premier lieu, aux termes de l’article R. 160-15 du code de l’urbanisme alors en vigueur :  » I. ‘ Le dossier soumis à enquête doit comprendre, outre les pièces prévues à l’article R. 160-14, la justification du bien-fondé du tracé retenu, au regard des dispositions des articles L. 160-6, R. 160-12 et R. 160-13 si le tracé envisagé pour la servitude a pour effet : 1° Soit de grever des terrains attenants à des maisons d’habitation qui, au 1er janvier 1976, étaient clos de murs en matériaux durables et adhérant au sol, soit de réduire, par rapport aux bâtiments à usage d’habitation édifiés au 1er janvier 1976, la distance de quinze mètres prévue par l’alinéa 5 de l’article L. 160-6 ; () « . Si un relevé topographique fait état d’une distance inférieure à 15 mètres entre la servitude et la maison de la SCI des Mouettes du Bois marin, sur les parcelles cadastrées section BA n°s 96 et 97, il n’est pas établi que le tracé figurant sur ce relevé serait identique à celui approuvé par l’arrêté litigieux. D’ailleurs, les intervenants font valoir sans être ensuite contredits que les photos et le plan produits avaient été dressés à partir de l’ancien sentier situé dans la propriété, bien au-dessus du tracé actuel et qu’en réalité, le sentier tel qu’il est désormais tracé est en contrebas de la propriété et à plus de 15 mètres. S’agissant de la distance inférieure à 15 mètres par rapport à la maison appartenant à la SCI de la Salinette, il ressort de la notice explicative que cette dérogation a été justifiée par un niveau de la maison sensiblement plus élevé que l’emprise de la servitude. Dès lors, ce moyen doit être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de l’article R. 160-14 du code de l’urbanisme alors en vigueur :  » En vue de la modification, par application des alinéas 2 et 3 de l’article L. 160-6, du tracé ainsi que, le cas échéant, des caractéristiques de la servitude, le chef du service maritime adresse au préfet, pour être soumis à enquête, un dossier qui comprend ; a) Une notice explicative exposant l’objet de l’opération prévue ; b) Le plan parcellaire des terrains sur lesquels le transfert de la servitude est envisagé, avec l’indication du tracé à établir et celle de la largeur du passage ; c) La liste par communes des propriétaires concernés par le transfert de la servitude, dressée à l’aide d’extraits des documents cadastraux délivrés par le service du cadastre ou à l’aide des renseignements délivrés par le conservateur des hypothèques au vu du fichier immobilier, ou par tous autres moyens ; d) L’indication des parties de territoire où il est envisagé de suspendre l’application de la servitude, notamment dans les cas visés à l’article R. 160-12, ainsi que les motifs de cette suspension, et celle des parties de territoire où le tracé de la servitude a été modifié par arrêté préfectoral en application du II de l’article R. 160-11. « Si le dossier soumis à enquête publique se borne à de nombreuses reprises à indiquer qu’une modification est opérée » pour tenir compte des obstacles de toute nature dus à la configuration des lieux « , la nature des obstacles en cause n’avait pas à être précisée pour respecter les dispositions précitées.

9. En troisième lieu, la circonstance que l’Etat se soit référé au plan cadastral et n’ait pas procédé, auprès des services de publicité foncière, à des investigations permettant de vérifier l’identité de tous les propriétaires concernés par la modification de la servitude ne suffit pas, en l’absence de contestation sérieuse sur ce point lors de l’établissement du dossier, à établir que le dossier d’enquête publique était insuffisant.

10. En quatrième lieu, si à la fin de l’année 2018, l’Etat a fait connaître aux propriétaires situés dans le secteur des Essarts son intention de débuter les travaux avec un tracé modifié, il n’est pas établi que les modifications en cause ne seraient pas des adaptations mineures et cette circonstance ne suffit pas à établir que le tracé approuvé par l’arrêté préfectoral en cause du 4 février 2015 était entaché d’erreurs.

11. En cinquième lieu, aux termes de l’article L. 160-6 du code de l’urbanisme alors en vigueur :  » Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d’une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. L’autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressés et au vu du résultat d’une enquête publique effectuée comme en matière d’expropriation : a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d’une part, d’assurer, compte tenu notamment de la présence d’obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d’autre part, de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exceptionnellement des propriétés non riveraines du domaine public maritime ; b) A titre exceptionnel, la suspendre. () « . Il ressort des pièces du dossier que l’arrêté attaqué mentionne qu’il y a lieu de valider le tracé aux fins d’assurer la continuité du cheminement des piétons en prenant en compte la configuration du littoral et les chemins préexistants. L’arrêté comprend en outre en annexes une notice explicative et des plans éclairant les motifs de cet arrêté. Cette notice indique que le tracé est situé sur la servitude de droit lorsque cela est possible et en servitude modifiée lorsque l’on doit s’éloigner de la limite du rivage. Dès lors, le moyen tiré de l’insuffisante motivation de l’arrêté attaqué doit être écarté.

12. En sixième et dernier lieu, aux termes de l’article R. 160-18 du code de l’urbanisme alors en vigueur :  » Le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête peut décider de procéder à une visite des lieux. Dans ce cas, le commissaire enquêteur ou le président de la commission avise le maire et convoque sur place les propriétaires intéressés ainsi que les représentants des administrations ; après les avoir entendus, il dresse procès-verbal de la réunion. « . Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 160-6, R. 160-18 et R. 160-19 du code de l’urbanisme relatives à la procédure d’enquête publique effectuée en matière de modification ou de suspension d’une servitude de passage sur le littoral que les propriétaires intéressés mentionnés à l’article R. 160-18 du code de l’urbanisme, qui doivent être convoqués sur place par le commissaire enquêteur lorsque celui-ci décide de procéder à une visite des lieux, s’entendent des seuls propriétaires des parcelles concernées soit par les modifications du tracé ou des caractéristiques de la servitude envisagées par l’autorité administrative soit par la suspension de la servitude. En revanche, l’obligation, prévue par l’article R. 160-18 du code de l’urbanisme, repris à l’article R.121-21, de convoquer à la visite des lieux les propriétaires intéressés ne se limite pas aux seuls propriétaires ayant exprimé le souhait qu’il soit procédé à une visite des lieux.

13. Il ressort des pièces du dossier que Servane, Briac et Jean de Labrusse avaient, depuis 2010, la nue-propriété des parcelles n°s 118 et 120 et pour le 1/5e indivis, des parcelles cadastrées section BA n°s 121 et 130. Ces quatre parcelles ont fait l’objet d’une modification du tracé de la servitude de passage, alors que Servane, Briac et Jean de Labrusse n’ont pas été convoqués à la visite sur les lieux du 25 avril 2014 et qui portait sur les parcelles cadastrées section BA n° s 118, 120, 121 et 130. Toutefois, Servane, Briac et Jean de Labrusse n’étaient pas mentionnés dans le cadastre et n’établissent pas avoir procédé aux mesures de publicité foncière à la date de l’arrêté attaqué. Le commissaire enquêteur, qui n’est tenu que de faire des mesures raisonnables pour rechercher les propriétaires intéressés, pouvait se borner à convoquer uniquement les propriétaires intéressés mentionnés sur le plan cadastral en vigueur. Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions précitées de l’article R. 160-18 du code de l’urbanisme ont été méconnues.

En ce qui concerne la légalité interne :

14. En premier lieu, aux termes de l’article R. 160-12 du code de l’urbanisme alors en vigueur : « A titre exceptionnel, la servitude instituée par l’article L. 160-6 peut être suspendue, notamment dans les cas suivants : () e) Si le maintien de la servitude de passage est de nature à compromettre () la stabilité des sols () ». A titre exceptionnel, cette servitude peut être suspendue, notamment lorsque la stabilité des sols est compromise ou pour tout autre motif d’ordre public.

15. L’étude produite par les requérants, effectuée certes de manière non contradictoire mais par un bureau d’études en géologie en mars 2015 mais révélant des faits antérieurs et portant sur le tracé entre l’extrémité Ouest de la plage de la Petite Salinette et celle du Perron (parcelles cadastrées section BA 96 et 97), indique que  » Dans l’état actuel, le passage sur ce chemin présente à plusieurs endroits un risque réel pour les promeneurs en cas d’éboulement soudain ; de plus le passage répété de nombreux promeneurs risque d’accroître et d’accélérer les phénomènes d’éboulement par érosion du sol et mobilisation des blocs instables. () En résumé, l’usage de ce chemin en bordure de falaise dans sa conformation actuelle, sans confortement et aménagement préalable, présente localement un danger réel de chutes lié à des glissements de sols le long d’une forte pente et des éboulements brusques pour les personnes, en particulier en groupe. « . L’autre étude produite par les requérants ne porte pas sur le secteur des Essarts, alors que le moyen n’est soulevé, dans la présente requête, que s’agissant de ce secteur. La défense n’établit pas que cette étude de mars 2015, effectuée par un expert géologue, manquerait d’objectivité. Le préfet, en première instance, se bornait à se référer à un constat du département d’une absence de risques, sans apporter aucun élément de nature à établir celle-ci. Si le préfet faisait valoir qu’ » il est facile de démontrer que le littoral entier est composé de fissures et d’infiltrations fragilisant les roches « , cette allégation ne peut suffire à écarter une étude portant sur un secteur précis effectuée par un expert géologue, avec des photographies à l’appui. De plus, le commissaire enquêteur avait recommandé dans ses conclusions qu’ » une expertise géologique et pédologique de la falaise et des terrains soit réalisée au moment des travaux pour définir le tracé précis sans dommages collatéraux pour les propriétés, la sécurité et l’environnement « . Enfin, il ressort des pièces du dossier qu’aucuns travaux de nature à réduire les risques mis en évidence dans l’étude précitée n’a été prévu par l’arrêté préfectoral attaqué. Dès lors, les requérants sont fondés à soutenir que les dispositions de l’article R. 160-12 du code de l’urbanisme ont été méconnues, mais uniquement s’agissant du tracé sur les parcelles cadastrées section BA n°s 96 et 97.

16. En deuxième lieu, aux termes du dernier alinéa de l’article L. 160-6 du code de l’urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur  : « Sauf dans le cas où l’institution de la servitude est le seul moyen d’assurer la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, la servitude instituée aux alinéas 1 et 2 ci-dessus ne peut grever les terrains situés à moins de quinze mètres des bâtiments à usage d’habitation édifiés avant le 1er janvier 1976, ni grever des terrains attenants à des maisons d’habitation et clos de murs au 1er janvier 1976. ». Aux termes de l’article R. 160-13 du même code dans sa rédaction alors en vigueur :  » () II. ‘ Sans préjudice de l’application de l’article L. 160-6 (alinéa 3), les distances de quinze mètres et de dix mètres par rapport aux bâtiments à usage d’habitation qui sont mentionnées respectivement à l’article L. 160-6 (alinéa 5) et au I du présent article peuvent être réduites : a) Lorsque le bâtiment à usage d’habitation est, en raison de la configuration des lieux, situé à un niveau sensiblement plus élevé que celui de l’emprise de la servitude ; b) S’il existe déjà, dans cet espace de quinze mètres ou de dix mètres, un passage ouvert à la libre circulation des piétons ; c) Si le mur clôturant le terrain sur lequel est situé le bâtiment est lui-même à moins de quinze mètres ou de dix mètres dudit bâtiment ; () III. ‘ Dans les autres cas que ceux visés au II, la distance de quinze ou de dix mètres peut également être réduite avec l’accord du propriétaire du bâtiment ; cet accord doit résulter d’une convention passée avec une collectivité publique ou un groupement de collectivités publiques. « .

17. Comme il a été dit au point 7, si un relevé topographique fait état d’une distance inférieure à 15 mètres entre la servitude et la maison de la SCI des Mouettes du Bois marin, sur les parcelles cadastrées section BA n°s 96 et 97, il n’est pas établi que le tracé figurant sur ce relevé serait identique à celui approuvé par l’arrêté litigieux. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

18. En troisième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que la piscine construite par M. C, au demeurant sans déclaration préalable, ne constitue pas un obstacle au cheminement des piétons, dès lors qu’un passage, d’environ un mètre de large, est possible entre la falaise et la piscine, des rambardes ou clôtures pouvant être installées de part et d’autre. Il n’est pas établi par les seules photographies produites qu’un risque d’érosion serait tel qu’il justifierait une suspension de la servitude au niveau de la propriété de M. C. Ce tracé ne méconnait pas, en tout état de cause, les stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne des droits de l’homme, M. Cpouvant notamment continuer à utiliser sa piscine.

19. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont seulement fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande d’annulation de l’arrêté du préfet d’Ille-et-Vilaine en tant que celui-ci a fixé le tracé de la servitude longitudinale de cheminement le long du littoral sur les parcelles cadastrées section BA n°s 96 et 97.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des requérants, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par les intervenants à ce titre, ces derniers n’étant d’ailleurs pas une partie au sens des dispositions précitées. En revanche, il y a lieu, en application de l’article L.761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l’Etat le versement aux requérants d’une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L’intervention de l’association des amis des chemins de ronde d’Ille-et-Vilaine, de l’association Dinard côte d’Émeraude Environnement et du cercle des amis de Saint-Briac et de la côte d’Émeraude est admise.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 15 décembre 2017 est annulé en tant que l’annulation prononcée ne portait pas sur le tracé concernant les parcelles cadastrées section BA n°s 96 et 97.

Article 3 : L’arrêté du 4 février 2015 du préfet d’Ille-et-Vilaine fixant le tracé de la servitude de cheminement le long du littoral sur le territoire de la commune de Saint-Briac-sur-Mer est annulé en tant que ce tracé institue une servitude de passage sur les parcelles cadastrées section BA n°s 96 et 97.

Article 4 : Il est mis à la charge de l’Etat le versement aux requérants d’une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des requérants est rejeté.

Article 6 : Les conclusions présentées par l’association des amis des chemins de ronde d’Ille-et-Vilaine, de l’association Dinard côte d’Émeraude Environnement et du cercle des amis de Saint-Briac et de la côte d’Émeraude au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Mouettes du Bois Marin, représentante unique désignée par Me E, au ministre de la cohésion des territoires, à l’association des amis des chemins de ronde d’Ille-et-Vilaine, représentante unique désignée par Me A.

Copie sera adressée au préfet d’Ille-et-Vilaine et à la commune de Saint-Briac-sur-Mer.

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