Cour Administrative d’Appel de Versailles
N° 09VE01965
Inédit au recueil Lebon
2ème Chambre
Mme TANDONNET-TUROT, président
M. Jean-Eric SOYEZ, rapporteur
Mme KERMORGANT, commissaire du gouvernement
SCP TIRARD & ASSOCIES, avocat
lecture du jeudi 8 juillet 2010
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 17 juin 2009 au greffe de la Cour administrative d’appel de Versailles, présentée pour M. Gonzalo A, demeurant …, par la SCP Ricard, Demeure et associés ; M. A demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0700944 du Tribunal administratif de Versailles du 8 avril 2009 ayant rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 28 novembre 2006 par lequel le maire de Nanterre a autorisé la société Bouygues Immobilier à construire un ensemble immobilier, sur un terrain sis 17, rue des Venêts ;
2°) d’annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Nanterre la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que les avis prévus à l’article R. 421-15 du code de l’urbanisme ont été recueillis sur la base d’un dossier incomplet ; que le volet paysager prévu à l’article R. 421-2 de ce code est également incomplet ; que l’article R. 421-5-2 du même code, relatif à la notice d’accessibilité des personnes handicapées et à l’engagement de favoriser l’accès de ces dernières, n’a pas été respecté ; que les dispositions de l’article UB 7-2 du règlement du plan local d’urbanisme ont été méconnues ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de la construction et de l’habitation ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le décret n° 80-637 du 4 août 1980 ;
Vu la circulaire n° 94-55 du 7 juillet 1994 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 24 juin 2010 :
– le rapport de M. Soyez, premier conseiller,
– et les conclusions de Mme Kermorgant, rapporteur public ;
Considérant que M. A relève appel du jugement du Tribunal administratif de Versailles du 8 avril 2009 ayant rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 28 novembre 2006 par lequel le maire de Nanterre a autorisé la société Bouygues Immobilier à construire un ensemble immobilier composé de 3 bâtiments comprenant 24 logements, sur un terrain sis 17, rue des Venêts ;
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article R* 421-15 du code de l’urbanisme alors en vigueur : Le service chargé de l’instruction de la demande procède, au nom de l’autorité compétente pour statuer, à cette instruction et recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur (…) ;
Considérant qu’il est constant qu’après les consultations qu’imposaient les dispositions précitées, le projet litigieux a subi plusieurs modifications relatives à la distance entre certaines maisons individuelles du futur ensemble immobilier, à la suppression de trois petites ouvertures éclairant les escaliers de certaines de ces maisons, à une légère augmentation de l’altimétrie des mêmes maisons pour des raisons d’étanchéité, à la suppression et au réaménagement des balcons du bâtiment destiné à l’habitat social donnant sur la rue des Venêts ; que les deux premières modifications étaient, par nature, sans incidence sur l’environnement de l’église de Nanterre, pour la protection de laquelle l’avis de l’architecte des Bâtiments de France avait été sollicité ; qu’il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, et qu’il n’est, d’ailleurs, pas même soutenu, que la légère surélévation du bâtiment donnant sur la rue des Venêts ait affecté cet environnement ; qu’enfin, la modification des balcons constitue une modification mineure ; qu’ainsi, l’architecte des Bâtiments de France, qui avait rendu un avis favorable le 7 août 2006 sur le projet, n’avait pas à être consulté à nouveau sur le dossier complété le 17 novembre 2006, en l’absence de modifications significatives concernant la protection des intérêts dont il avait la charge ; que, par ailleurs, M. A n’assortit pas de précisions permettant d’en apprécier la portée ses allégations relatives au défaut de consultation d’autres services ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l’urbanisme doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article R. 421-2 du code de l’urbanisme alors en vigueur : A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (…) 6° Un document graphique au moins permettant d’apprécier l’insertion du projet de construction dans l’environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords. Lorsque le projet comporte la plantation d’arbres de haute tige, les documents graphiques devront faire apparaître la situation à l’achèvement des travaux et la situation à long terme (…) ;
Considérant que, d’une part, si les documents joints au dossier de demande de permis de construire et intitulés perspective d’intégration ne représentent qu’une façade du bâtiment destiné à l’habitat social, il n’est pas contesté que, de l’ensemble en projet, seule cette façade sera visible de la voie publique ; que, d’autre part, les autres plans joints à la demande de la société Bouygues Immobilier, notamment les plans de coupe, ainsi que les nombreuses photographies et la notice d’insertion, permettaient de connaître les caractéristiques de l’environnement du projet ; qu’ainsi, l’absence d’autres documents dits de perspective d’intégration , s’agissant d’un ensemble immobilier enclavé pour sa plus grande partie et, notamment, bordé par les bâtiments plus élevés de la chambre de commerce, n’a pas été de nature à empêcher le maire de la commune de Nanterre d’apprécier l’insertion du projet dans le paysage et son impact visuel ;
Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article R. 421-5-2 du code de l’urbanisme, applicable à l’espèce : Lorsque les travaux projetés concernent des locaux autres que les établissements recevant du public et sont soumis aux règles d’accessibilité aux personnes handicapées fixées en application de l’article L. 111-7 du code de la construction et de l’habitation, le dossier de la demande de permis de construire est complété par l’engagement du demandeur et, le cas échéant, de l’architecte de respecter lesdites règles. Cet engagement est assorti d’une notice décrivant les caractéristiques générales des locaux, installations et aménagements extérieurs au regard de ces règles d’accessibilité. ; qu’aux termes de l’article L. 111-7 du code de la construction et de l’habitation : Les dispositions architecturales, les aménagements et équipements intérieurs et extérieurs des locaux d’habitation, qu’ils soient la propriété de personnes privées ou publiques, des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des lieux de travail doivent être tels que ces locaux et installations soient accessibles à tous, et notamment aux personnes handicapées, quel que soit le type de handicap, notamment physique, sensoriel, cognitif, mental ou psychique, dans les cas et selon les conditions déterminés aux articles L. 111-7-1 à L. 111-7-3 (…) ; qu’aux termes de l’article R*.111-18 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 4 août 1980, seule applicable à une demande de permis de construire déposée, comme en l’espèce, avant le 1er janvier 2007 : Doivent être accessibles par un cheminement praticable sans discontinuité, aux personnes handicapées à mobilité réduite, y compris celles qui se déplacent en fauteuil roulant, les bâtiments d’habitation collectifs, les logements situés dans ces bâtiments, les ascenseurs ou un ascenseur au moins par batterie d’ascenseurs, les locaux collectifs affectés aux ensembles résidentiels et une partie des places de stationnement d’automobiles destinées aux habitants et aux visiteurs. Dans les mêmes bâtiments, les étages non desservis par ascenseurs doivent être accessibles à toutes personnes handicapées à mobilité réduite par un escalier conçu de telle sorte que les intéressés puissent recevoir une aide appropriée. ;
Considérant que, si les dispositions législatives et réglementaires précitées, applicables à la date de la demande du permis de construire litigieux, imposent, pour tout projet de construction d’un bâtiment d’habitation collectif, la production des pièces prévues à l’article R. 421-5-2 du code de l’urbanisme, ces dispositions ne donnent pas de définition d’un tel bâtiment ;
Considérant que l’ensemble immobilier en projet comporte un bâtiment intermédiaire attenant à celui destiné à l’habitat social et qui consiste en la superposition d’un duplex et d’un triplex possédant chacun sa propre entrée ; qu’à l’exception d’un garage souterrain, il n’existe aucune partie commune ni à ces deux logements superposés, ni à ce bâtiment intermédiaire et à celui destiné à l’habitat social ; qu’ainsi, ce bâtiment intermédiaire ne revêt pas le caractère d’une habitation collective ; qu’il suit de là qu’aucune disposition législative ou réglementaire applicable à l’espèce n’obligeait le pétitionnaire à fournir, pour ce bâtiment, une notice d’accessibilité pour les personnes handicapées et un engagement de respecter les règles favorisant cette accessibilité ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l’urbanisme et du code de la construction et de l’habitation ne peut qu’être écarté ;
Considérant que M. A ne saurait se prévaloir de la circulaire du 7 juillet 1994 relative à l’accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public, qui confère le caractère d’habitation collective à tout bâtiment comprenant des logements superposés, cette circulaire donnant des dispositions précitées du code de la construction et de l’habitation une interprétation impérative et, par suite, entachée d’excès de pouvoir ;
Considérant que, de même, en vertu du principe d’indépendance des législations, le requérant ne saurait utilement invoquer les dispositions de l’article 324 de l’annexe III au code général des impôts, qui confèrent le caractère d’immeuble collectif à toute propriété bâtie aménagée pour, au moins, deux occupants ;
Considérant, enfin, qu’il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d’écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l’article UB 7-2 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune de Nanterre, moyen que M. A reprend sans changement en appel ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Nanterre qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d’une somme au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
Considérant, en revanche, qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A le versement, à ce titre, de la somme de 1 000 euros, d’une part, à la société Bouygues Immobilier et, d’autre part, à la commune de Nanterre ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : M. A versera à la société Bouygues Immobilier, d’une part, et à la commune de Nanterre, d’autre part, une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.