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Permis de construire : mise en pratique de la théorie de la connaissance acquise !

Conseil d’État

N° 375132   
Publié au recueil Lebon
6ème / 1ère SSR
M. Stéphane Decubber, rapporteur
M. Xavier de Lesquen, rapporteur public
SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX, avocats

lecture du vendredi 15 avril 2016

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

M. D…C…a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 24 avril 2008 par lequel le maire de la commune de Freissinières a délivré un permis de construire à M. A…B…. Par une ordonnance n° 1100579 du 9 mai 2011, le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 11MA02558 du 26 janvier 2012, le président de la 1ère chambre de la cour administrative d’appel de Marseille a, après avoir annulé l’ordonnance du 9 mai 2011, rejeté la demande de M.C….

Par une décision n° 358011 du 25 juillet 2013, le Conseil d’Etat statuant au contentieux, a annulé cette ordonnance du 26 janvier 2012 et renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Marseille.

Par une ordonnance n° 13MA03418 du 2 décembre 2013, le président de la 1ère chambre de la cour administrative d’appel de Marseille a, après avoir annulé l’ordonnance du 9 mai 2011, rejeté la demande de M.C….

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 février et 2 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. C…demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Freissinières la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Stéphane Decubber, maître des requêtes en service extraordinaire,
– les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de M. C…;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le maire de Freissinières a, par arrêté du 24 avril 2008, délivré un permis de construire à M. B…; que le panneau d’affichage situé sur le terrain d’assiette, s’il faisait mention de ce permis, n’indiquait pas les voies et délais de recours contre celui-ci ; que, par un courrier reçu par le maire de Freissinières le 2 juillet 2008, M. C…a formé un recours administratif contre cet arrêté ; que le 28 janvier 2011, M. C…en a demandé l’annulation devant le juge administratif par une demande que le président de la huitième chambre du tribunal administratif de Marseille a rejetée par une ordonnance du 9 mai 2011 ; que M. C…se pourvoit en cassation contre l’ordonnance du 2 septembre 2013 par laquelle le président de la première chambre de la cour administrative d’appel de Marseille, après avoir annulé l’ordonnance du 24 avril 2008, a rejeté sa demande au motif qu’elle était tardive ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article R*600-2 du code de l’urbanisme :  » Le délai de recours contentieux à l’encontre (…) d’un permis de construire (…) court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l’article R. 424-15.  » ; qu’aux termes de l’article R*424-15 du même code :  » Mention du permis (…) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l’arrêté (…) et pendant toute la durée du chantier. (…) / Un arrêté du ministre chargé de l’urbanisme règle le contenu et les formes de l’affichage.  » ; qu’aux termes de l’article A. 424-17 du même code :  » Le panneau d’affichage comprend la mention suivante : /  » Droit de recours : /  » Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l’urbanisme). (…) »  » ;

3. Considérant que la mention relative au droit de recours, qui doit figurer sur le panneau d’affichage du permis de construire en application de l’article A. 424-17 du code de l’urbanisme, permet aux tiers de préserver leurs droits ; que, toutefois, l’exercice par un tiers d’un recours administratif ou contentieux contre un permis de construire montre qu’il a connaissance de cette décision et a, en conséquence, pour effet de faire courir à son égard le délai de recours contentieux, alors même que la publicité concernant ce permis n’aurait pas satisfait aux exigences prévues par l’article A. 424-17 du code de l’urbanisme ;

4. Considérant qu’en formant, par la lettre reçue par le maire de Freissinières le 2 juillet 2008, un recours administratif à l’encontre de l’arrêté du 24 avril 2008, M. C…a manifesté avoir acquis la connaissance du permis de construire délivré à M. B…le 2 juillet 2008 ; que, dès lors, c’est sans erreur de droit que le président de la première chambre de la cour administrative d’appel de Marseille a pu juger, en dépit du défaut de mention des délais de recours sur le panneau d’affichage du permis litigieux, que la requête introduite par M. C… le 28 janvier 2011 devant le tribunal administratif de Marseille, plus de deux mois après que le recours administratif qu’il avait formé avait été rejeté, était tardive ;

5. Considérant que les règles d’opposabilité des délais de recours énoncées au point 3 poursuivent un but légitime de préservation de la sécurité juridique de la situation des bénéficiaires de permis de construire ; que ces règles, qui permettent aux tiers de former un recours contentieux dans le délai de droit commun de deux mois à compter du rejet du recours administratif qu’ils ont formé, sont proportionnées au but poursuivi ; que, par suite, l’ordonnance attaquée n’a pas été prise en méconnaissance des articles 6 § 1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. C…doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :
————–
Article 1er : Le pourvoi de M. C…est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Monsieur D…C…, à la commune de Freissinières et à Monsieur A…B….

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