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Permis de construire : le panneau affiché sur une voie privée ouverte au public est régulier !

Conseil d’État 

N° 360860    
Inédit au recueil Lebon
5ème et 4ème sous-sections réunies
Mme Domitille Duval-Arnould, rapporteur
M. Nicolas Polge, rapporteur public
SCP BORE, SALVE DE BRUNETON ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN, avocats

lecture du vendredi 21 juin 2013

REPUBLIQUE FRANCAISEAU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 juillet et 5 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SCI Marty, dont le siège est chez la SA Drion, 13 avenue d’Oc à Montpellier (34000) ; la SCI Marty demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt n° 10MA01929 du 7 mai 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a, à la demande de Mme B…A…, d’une part, annulé le jugement n° 0805243 du 1er avril 2010 du tribunal administratif de Montpellier rejetant la demande de Mme A…tendant à l’annulation du permis de construire délivré le 29 mai 2008 à la SCI Marty par le maire de Béziers en vue d’une extension des bâtiments d’un supermarché et, d’autre part, annulé ce permis ;

2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel présenté par MmeA… ;

3°) de mettre à la charge de Mme A…le versement d’une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 juin 2013, présentée pour MmeA… ;

Vu le code de l’urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Domitille Duval-Arnould, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

– les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de la SCI Marty et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de Mme A…;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 29 mai 2008, le maire de Béziers a délivré à la SCI Marty un permis de construire en vue d’une extension des bâtiments d’un supermarché par la réalisation d’un local de stockage d’une surface hors oeuvre nette de 40 m² ; que, par un jugement du 1er avril 2010, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme A…tendant à l’annulation de cet arrêté ; que, saisie par MmeA…, la cour administrative d’appel de Marseille a, par un arrêt du 7 mai 2012, annulé le jugement du tribunal administratif ainsi que l’arrêté du maire de Béziers ; que la SCI Marty se pourvoit contre cet arrêt ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme :  » Le délai de recours contentieux à l’encontre (…) d’un permis de construire (…) court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l’article R. 424-15  » ; qu’aux termes de l’article R. 424-15 du même code :  » Mention du permis (…) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l’arrêté (…) et pendant toute la durée du chantier (…)  » ; qu’aux termes de l’article A. 424-18 :  » Le panneau d’affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu’il contient demeurent…  » ;

3. Considérant que, pour juger que l’affichage sur le terrain du permis de construire délivré le 29 mai 2008 par le maire de Béziers à la SCI Marty n’avait pas fait courir le délai du recours contentieux, la cour administrative d’appel a relevé que le panneau d’affichage était situé dans le fond du parking du supermarché, dans un coin, à proximité d’une partie du bâtiment non ouverte au public ; qu’en se fondant sur ces seuls éléments, sans rechercher si le panneau était visible de l’extérieur et si les mentions qui y figuraient étaient lisibles depuis le parking, lequel constituait un espace ouvert au public au sens des dispositions de l’article A. 424-18 du code de l’urbanisme, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, la SCI Marty est fondée à demander l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille du 7 mai 2012 ;

4. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond par application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier et notamment de constats d’huissiers établis les 20 juin, 22 juillet et 21 août 2008 que mention du permis de construire délivré le 29 mai 2008 par le maire de Béziers à la SCI Marty a été affichée sur le terrain de façon continue pendant deux mois, au moins à compter du 20 juin 2008 ; qu’il ressort aussi de ces constats que le panneau d’affichage comportait toutes les mentions exigées par les dispositions des articles A. 424-16 et A. 424-17 du code de l’urbanisme et que, placé sur le parking du supermarché, en un lieu dont le choix n’était pas constitutif d’une manoeuvre visant à priver d’effet la mesure de publicité prévue par le code de l’urbanisme, il était visible de l’extérieur et lisible depuis un espace ouvert au public dans des conditions conformes aux exigences des articles R. 424-15 et A. 424-18 ; qu’il en résulte que le délai de recours de deux mois mentionné à l’article R. 600-2 du code de l’urbanisme, qui a couru au plus tard à compter du 20 juin 2008 et n’a pas été suspendu par un recours administratif, était déjà expiré à la date du 19 novembre 2008 à laquelle la demande de Mme A…tendant à l’annulation du permis a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montpellier ; que, dès lors, cette demande était tardive et par suite irrecevable ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme A… n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme A…la somme de 3 000 euros à verser à la SCI Marty au titre des mêmes dispositions, pour les frais exposés en cassation et en appel ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la commune de Béziers devant la cour administrative d’appel ;

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille du 7 mai 2012 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par Mme A…devant la cour administrative d’appel de Marseille est rejetée.

Article 3 : Mme A…versera une somme de 3 000 euros à la SCI Marty au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative par Mme A…devant le Conseil d’Etat et la cour administrative d’appel de Marseille ainsi que les conclusions présentées au même titre par la commune de Béziers devant la cour administrative d’appel de Marseille sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SCI Marty, à Mme B…A…et à la commune de Béziers.

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