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Permis de construire : délai de péremption et nécessité d’une autorisation de police environnementale !

Conseil d’État 

N° 383329    
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
9ème – 10ème chambres réunies
M. Julien Anfruns, rapporteur
Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public
SCP HEMERY, THOMAS-RAQUIN ; SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS, avocats

lecture du vendredi 10 février 2017

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

La S.A.R.L. Immoconseil a demandé au tribunal administratif de Nîmes d’annuler, d’une part, les décisions par lesquelles la communauté d’agglomération Nîmes Métropole et la commune de Saint-Gilles (Gard) ont rejeté sa demande d’autorisation de procéder aux raccordements aux réseaux publics d’eaux usées et d’eau potable de son projet de lotissement-village équestre  » Les Hauts de Fourniguet  » et, d’autre part, l’arrêté interruptif de travaux du maire de la commune de Saint-Gilles du 26 novembre 2009. Par un jugement nos 1000053, 1000054 du 11 mars 2011, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 11LY21932 du 3 juin 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel formé par la S.A.R.L. Immoconseil contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 31 juillet et 30 octobre 2014 et 22 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la S.A.R.L. Immoconseil demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Gilles et à la charge de la communauté d’agglomération de Nîmes-Métropole la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code de l’environnement ;
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Julien Anfruns, maître des requêtes en service extraordinaire,

– les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat de la société Immoconseil et à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la commune de Saint-Gilles et de la société communauté d’agglomération Nîmes-métropole ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que par un arrêté du 26 janvier 2004, le maire de Saint-Gilles a autorisé la S.A.R.L. Immoconseil à lotir en 61 lots un terrain d’une contenance d’environ 17 ha situé lieu-dit  » le Fourniguet « , sur le territoire de la commune de Saint-Gilles (Gard). Par un nouvel arrêté du 29 avril 2004, le maire a procédé au retrait de cette autorisation et a refusé de délivrer une autorisation de lotir à la société Immoconseil. Saisi par cette dernière, le tribunal administratif de Nîmes a, par jugement du 8 décembre 2006 non frappé d’appel, annulé cet arrêté du 29 avril 2004. La S.A.R.L. Immoconseil, rétablie dans ses droits, a demandé à la Communauté d’Agglomération Nîmes Métropole et à la commune de Saint-Gilles l’autorisation de procéder aux raccordements aux réseaux publics d’eaux usées et d’eau potable, sous l’emprise des voies communales, de son projet de lotissement dit  » Les Hauts de Fourniguet « . Ses demandes ont été rejetées.. Par arrêté du 26 novembre 2009, le maire de Saint-Gilles, agissant au nom de l’Etat, a alors mis en demeure la S.A.R.L. Immoconseil de cesser immédiatement les travaux entrepris sur la parcelle concernée. Par jugement du 11 mars 2011, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté les demandes de la SARL Immoconseil tendant à l’annulation, d’une part, des décisions par lesquelles le président de la Communauté d’agglomération Nîmes Métropole et le maire de Saint-Gilles ont rejeté sa demande d’autorisation de procéder aux raccordements aux réseaux publics et, d’autre part, de l’arrêté interruptif de travaux. Par un arrêt du 13 mai 2014, la cour administrative d’appel de Lyon a rejeté l’appel formé par la société contre ce jugement.

2. Le délai de péremption des travaux de construction est prévu par l’article R. 424-17 du code de l’urbanisme issu du décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007, en vigueur depuis le 1er octobre 2007 et aux termes duquel :  » Le permis de construire, d’aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l’article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue (…) « . Toutefois, aux termes de l’article R. 424-20 du code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable au litige :  » Lorsque le commencement des travaux est subordonné à une autorisation ou à une procédure prévue par une autre législation, le délai de deux ans mentionné à l’article R. 424-17 court à compter de la date à laquelle les travaux peuvent commencer en application de cette législation si cette date est postérieure à la notification visée à l’article R. 242-10 ou à la date à laquelle la décision tacite est intervenue « .

3. Aux termes de l’article L. 214-3 du code de l’environnement  » Sont soumis à autorisation de l’autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d’accroître notablement le risque d’inondation, de porter atteinte gravement à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique « .

4. Il résulte de la combinaison de ces textes que, s’agissant de travaux soumis aux prescriptions du code de l’environnement relatives à la protection des eaux et dont la réalisation est, à ce titre, subordonnée à une autorisation, le délai de péremption du permis de construire prévu par l’article R 424-20 du code de l’urbanisme court à compter de la date à laquelle les travaux peuvent commencer en application de cette autorisation environnementale.

5. Il résulte de ce qui précède qu’en jugeant  » qu’il ne [ressortait] pas des pièces du dossier qu'(…) aucun des travaux autorisés par l’autorisation de lotir ne pouvait être débuté indépendamment de l’obtention de l’autorisation au titre de la loi sur l’eau « , que  » le commencement des travaux autorisés par l’autorisation de lotir n'[étaient] pas subordonné à l’autorisation au titre de la loi sur l’eau  » et que  » la SARL Immoconseil ne [pouvait] utilement invoquer les dispositions de l’article R. 424-20 du code de l’urbanisme « , la cour a commis une erreur de droit. Il suit de là, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que son arrêt doit être annulé.

6. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Immoconseil. En revanche il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Gilles une somme de 1 500 euros à verser à la société Immoconseil au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et à la charge de l’agglomération Nîmes-Métropole une somme de 1 500 euros à verser à la société Immoconseil au même titre.

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 3 juin 2014 est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée à la cour administrative d’appel de Lyon.
Article 3 : La communauté d’agglomération Nîmes-Métropole et la commune de Saint-Gilles verseront chacune à la S.A.R.L. Immoconseil une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la S.A.R.L. Immoconseil, à la ministre du logement et de l’habitat durable, à la communauté d’agglomération Nîmes-Métropole, et à la commune de Saint-Gilles.
Copie en sera adressée à la ministre du logement et de l’habitat durable.

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