Conseil d’État
N° 366036
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
8ème / 3ème SSR
M. Patrick Quinqueton, rapporteur
M. Benoît Bohnert, rapporteur public
BALAT, avocat
lecture du vendredi 13 février 2015
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°, sous le n° 366036, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 14 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’établissement public Voies navigables de France (VNF), dont le siège est 175, rue Ludovic Boutleux à Béthune (62408) ; il demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt n° 11VE03360 du 8 novembre 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Versailles, statuant sur l’appel de Mme B…A…, a annulé le jugement n°s 0711489, 0906146 du 20 juillet 2011 du tribunal administratif de Versailles et les titres de recettes exécutoires n°s 0000121 et 0000467 émis respectivement les 17 et 18 janvier 2007 à l’encontre de Mme A…;
2°) de mettre à la charge de Mme A…la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que la contribution pour l’aide juridique mentionnée à l’article R. 761-1 du même code ;
Vu 2°, sous le n° 366037, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 14 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’établissement public Voies navigables de France ; il demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt n° 11VE03361 du 8 novembre 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Versailles, statuant sur l’appel de Mme B…A…, a annulé le jugement n°s 0709609, 0800794, 0805554, 0811724, 0906295 du 20 juillet 2011 du tribunal administratif de Versailles et les titres de recettes exécutoires émis respectivement les 26 juin, 27 novembre et 19 décembre 2007, ainsi que les 21 janvier, 17 avril, 22 mai, 23 juin, 3 juillet et 28 août 2008, à l’encontre de Mme A…;
2°) de mettre à la charge de Mme A…la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que la contribution pour l’aide juridique mentionnée à l’article R. 761-1 du même code ;
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Vu 3°, sous le n° 366038, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 14 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’établissement public Voies navigables de France ; il demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt n°11VE03362 du 8 novembre 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Versailles, statuant sur l’appel de Mme B…A…, a annulé le jugement n°s 0903033, 0906294 du 20 juillet 2011 du tribunal administratif de Versailles et les titres de recettes exécutoires n°s 0015058, 0016627, 0017956, 0000845 et 0002112 émis respectivement les 13 octobre, 4 novembre et 11 décembre 2008, ainsi que les 13 janvier et 2 février 2009, à l’encontre de Mme A…;
2°) de mettre à la charge de Mme A…la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que la contribution pour l’aide juridique mentionnée à l’article R. 761-1 du même code ;
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Vu 4°, sous le n° 366039, le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 14 mai 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’établissement public Voies navigables de France ; il demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt n° 11VE03366 du 8 novembre 2012 par lequel la cour administrative d’appel de Versailles, statuant sur l’appel de Mme B…A…, a annulé le jugement n° 0907260 du 22 juillet 2011 du tribunal administratif de Versailles et les titres de recettes exécutoires n°s 0003269, 0004221, 0006099, 0007450 et 0009470 émis respectivement les 19 mars, 6 avril, 30 avril, 4 juin et 8 juillet 2009 à l’encontre de Mme A… ;
2°) de mettre à la charge de Mme A…la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que la contribution pour l’aide juridique mentionnée à l’article R. 761-1 du même code ;
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Vu les arrêts attaqués ;
Vu les pièces des dossiers desquelles il ressort que les pourvois ont été communiqués à Mme A…, qui n’a pas produit de mémoire ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du domaine de l’Etat ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Patrick Quinqueton, conseiller d’Etat,
– les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Balat, avocat de la Voies navigables de France ;
1. Considérant que les pourvois visés ci-dessus concernent le même occupant du domaine public et présentent à juger les mêmes questions ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
2. Considérant que, conformément aux principes applicables au domaine public, qui résultent tant des dispositions de l’article L. 28 du code du domaine de l’Etat, applicables jusqu’au 30 juin 2006, que de celles de l’article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques et de son article L. 2122-8, entré en vigueur le 1er janvier 2007, toute occupation du domaine public donne lieu au paiement d’une redevance ; que, sans préjudice de la répression éventuelle des contraventions de grande voirie, le gestionnaire de ce domaine est fondé à réclamer à un occupant sans titre une indemnité compensant les revenus qu’il aurait pu percevoir d’un occupant régulier pendant cette période ; que ce principe s’applique, que l’emplacement irrégulièrement occupé soit interdit ou non ; que, par ailleurs, l’article L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit que l’indemnité due au titre d’une occupation irrégulière du domaine public fluvial est majorée de 100 % ;
3. Considérant qu’il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond qu’au cours de la période litigieuse, le bateau de Mme A…occupait à Meudon, le long de la rive gauche de la Seine, un emplacement sur lequel tout stationnement était interdit ; qu’en application du principe précité, Voies navigables de France pouvait assujettir cette occupante irrégulière du domaine public fluvial au paiement d’une indemnité pour stationnement irrégulier ; que la circonstance que l’emplacement en cause fît l’objet d’une interdiction de tout stationnement pour des raisons de sécurité n’empêchait pas le gestionnaire du domaine de fixer le montant de l’indemnité due par l’occupante irrégulière par référence au montant de la redevance due pour un emplacement similaire ; qu’il suit de là, qu’en jugeant qu’il résulte nécessairement de l’économie générale et des termes des articles L. 28 du code du domaine de l’Etat et L. 2125-8 du code général de la propriété des personnes publiques que des indemnités d’occupation du domaine public ne peuvent être mises à la charge de l’occupant sans droit ni titre lorsque ce dernier occupe un emplacement sur lequel tout stationnement est interdit pour des raisons impérieuses de sécurité, la cour administrative d’appel de Versailles a commis une erreur de droit ;
4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen du pourvoi, que Voies navigables de France est fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme A… le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les arrêts de la cour administrative d’appel de Versailles du 8 novembre 2012 sont annulés.
Article 2 : Les affaires sont renvoyées devant la cour administrative d’appel de Versailles.
Article 3 : Mme A…versera à Voies navigables de France la somme de 3 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Voies navigables de France et à Mme B…A….