Vu la procédure suivante :
M. C. M. B. et Mme L. B. née D., M. H. E. et Mme N. G. O. A., ainsi que M. K. I. et Mme G. P. I. ont demandé au tribunal administratif de Versailles d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 13 août 2019 par lequel le maire de Saint-Pierre-du-Perray a accordé à M. Q J. F. un permis de construire pour la réalisation de deux bâtiments comportant trois logements avec terrasse et garage, après démolition totale de la construction principale existante, d’un garage et de deux abris de jardin, ainsi que l’arrêté du 23 novembre 2020 lui accordant un permis de construire modificatif. Par un jugement n° 1908427 du 8 octobre 2021 le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés le 8 décembre 2021 et les 3 mars et 27 décembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. et Mme B. et M. et Mme I. demandent au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat et de M. J. F. la somme de 5 000 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Pierre Boussaroque, conseiller d’Etat,
– les conclusions de M. Arnaud Skzryerbak, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de M. et Mme B. et autres ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le maire de Saint-Pierre-du-Perray a, au nom de l’Etat, par un arrêté du 13 août 2019, délivré à M. J. F. un permis de construire pour l’édification de deux bâtiments à usage d’habitation après démolition d’une habitation existante. M. et Mme B. et d’autres requérants ont demandé au tribunal administratif de Versailles d’annuler pour excès de pouvoir ce permis de construire ainsi que le permis de construire modificatif délivré le 23 novembre 2020 à M. J. F. pour le même projet. Par un jugement du 8 octobre 2021 contre lequel M. et Mme B. et d’autres requérants de première instance se pourvoient en cassation, ce tribunal a rejeté leur demande.
2. Aux termes de l’article L. 600-5-2 du code de l’urbanisme : « Lorsqu’un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation intervient au cours d’une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d’aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue et que ce permis modificatif, cette décision modificative ou cette mesure de régularisation ont été communiqués aux parties à cette instance, la légalité de cet acte ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance ».
3. Il résulte de ces dispositions que les parties à une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d’aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue sont recevables à contester la légalité d’un permis modificatif, d’une décision modificative ou d’une mesure de régularisation intervenue au cours de cette instance, lorsqu’elle leur a été communiquée, tant que le juge n’a pas statué au fond, sans condition de forme ni de délai. Si cette contestation prend la forme d’un recours pour excès de pouvoir présenté devant la juridiction saisie de la décision initiale ou qui lui est transmis en application de l’article R. 351-3 du code de justice administrative, elle doit être regardée comme un mémoire produit dans l’instance en cours. La circonstance qu’elle ait été enregistrée comme une requête distincte est toutefois sans incidence sur la régularité du jugement ou de l’arrêt attaqué, dès lors qu’elle a été jointe à l’instance en cours pour y statuer par une même décision.
4. Pour rejeter en l’espèce comme tardives les conclusions de M. et Mme B. et autres tendant à l’annulation du permis de construire modificatif délivré le 23 novembre 2020 à M. J. F., qui avait été versé à l’instance en cours portant sur la demande des mêmes requérants tendant à l’annulation du permis de construire initial et leur avait été communiqué, le tribunal administratif de Versailles s’est fondé sur la circonstance qu’ils lui avaient demandé l’annulation de ce permis de construire modificatif par une requête enregistrée le 21 janvier 2021 sous un numéro d’instance distinct, dont il a estimé qu’elle ne constituait de ce fait pas une contestation recevable au titre de l’article L. 600-5-2 du code de l’urbanisme et qu’en outre, l’introduction de cette requête avait, en manifestant la connaissance que M. et Mme B. avaient acquise de ce permis modificatif, fait courir à leur encontre le délai de recours de deux mois prévu à l’article R. 421-1 du code de justice administrative. Il en a déduit que ce délai était expiré lorsque les requérants, après avoir contesté la légalité de ce permis modificatif par un mémoire versé le 3 février 2021 à l’instance en cours contre le permis initial, ont expressément ajouté à leurs conclusions dirigées contre le permis initial, le 23 juillet 2021, des conclusions tendant à l’annulation pour excès de pouvoir du permis de construire modificatif. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu’en statuant ainsi, alors que le délai de recours de l’article R. 421-1 du code de justice administrative n’était pas opposable aux requérants, auxquels il incombait seulement de contester le permis de construire modificatif avant que le tribunal administratif n’ait statué au fond sur le permis de construire initial, le tribunal administratif a entaché son jugement d’erreur de droit.
5. Il suit de là que M. et Mme B. et autres sont fondés, pour ce motif, à demander l’annulation du jugement qu’ils attaquent, y compris en tant qu’il porte sur le permis de construire initial, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leur pourvoi.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme globale de 3 000 € à verser à M. et Mme B. et autres au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Décide :
Article 1er : Le jugement du 8 octobre 2021 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée au tribunal administratif de Versailles.
Article 3 : L’Etat versa à M. et Mme B. et autres une somme globale de 3 000 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. M. B., représentant unique désigné, pour l’ensemble des requérants, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à M. Q. J. F.