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Autorisation d’urbanisme : précisions sur le permis de construire « de régularisation » et l’économie générale !

Arrêt rendu par Conseil d’Etat
sect.
26-07-2022
n° 437765

Texte intégral :
Vu la procédure suivante :

Mme V. a demandé au tribunal administratif de Montreuil d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 18 juin 2018, par lequel le maire de Montreuil a délivré à M. G. un permis de construire modificatif du permis qui lui a été accordé le 27 février 2015 pour la construction d’un ensemble immobilier de trois logements sur un terrain situé 21 rue de l’Ermitage, ainsi que la décision implicite du maire refusant de retirer cet arrêté.

Par un jugement n° 1900007 du 20 novembre 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 janvier et 29 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, Mme V. demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Montreuil la somme de 4 000 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

– le code de l’urbanisme ;

– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Cécile Vaullerin, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de Mme V., à la SCP Foussard, Froger, avocat de la commune de Montreuil et à la SCP L. Poulet-Odent, avocat de M. G. ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme V. a demandé au tribunal administratif de Montreuil l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté du 18 juin 2018 par lequel le maire de Montreuil a délivré à M. G. un permis de construire modifiant un permis initial accordé, le 27 février 2015, pour la construction d’un ensemble immobilier de trois logements, sur un terrain situé 21 rue de l’Ermitage, ainsi que la décision implicite de refus née du silence gardé par le maire sur sa demande de retrait de cet arrêté. Par un jugement du 20 novembre 2019, contre lequel Mme V. se pourvoit en cassation, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative : « Lorsque l’affaire est en état d’être jugée, les parties peuvent être informées de la date ou de la période à laquelle il est envisagé de l’appeler à l’audience. Cette information précise alors la date à partir de laquelle l’instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 613-1 et le dernier alinéa de l’article R. 613-2. […]. » Il résulte des derniers alinéas, respectivement, des articles R. 613-1 et R. 613-2 que lorsque la date prévue par l’article R. 611-11-1 est échue, l’instruction peut être close à la date d’émission de l’ordonnance qui prononce cette clôture ou à la date d’émission de l’avis d’audience.

3. En vertu de l’article R. 611-11-1, lorsque l’affaire est en état d’être jugée, le tribunal administratif ou la cour administrative d’appel peut mettre en oeuvre la procédure d’information des parties définie par les dispositions de cet article en leur indiquant la date ou la période à laquelle il est envisagé de l’appeler à l’audience, ainsi que la date à partir de laquelle l’instruction pourra être close par une clôture à effet immédiat. L’absence de production de mémoire par la partie en défense, que celle-ci ait été ou non mise en demeure de produire, ne fait pas obstacle à ce que le juge, s’il l’estime utile, mette en oeuvre cette procédure. Cependant, la faculté de prendre une ordonnance de clôture d’instruction à effet immédiat n’est ouverte qu’à compter de la date fixée dans la lettre d’information et une fois expiré chacun des délais laissés aux parties pour produire un mémoire ou répliquer aux mémoires communiqués.

4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif que, par des courriers du 30 avril 2019, le tribunal administratif a informé les parties de la période à laquelle il était envisagé d’appeler l’affaire à l’audience, au quatrième trimestre 2019, et a par ailleurs précisé que l’instruction était susceptible d’être close par l’émission d’une ordonnance prise en application de l’article R. 611-11-1, qui pourrait intervenir à compter du 20 mai 2019. Le même jour, le tribunal a mis en demeure la commune de produire ses observations dans un délai de dix jours. Le premier mémoire en défense de la commune, enregistré le 13 mai 2019, a été communiqué le même jour à Mme V. par le tribunal, qui lui a donné un délai de trente jours pour y répondre et a refusé, par un courrier du 17 mai 2019, de prolonger ce délai. Le mémoire en réplique de Mme V. a été produit dans le délai imparti, le 20 mai 2019, et communiqué à la commune, à qui un délai de dix jours a été laissé pour y répondre. La commune a produit un second mémoire en défense le 6 juin 2019, qui a été communiqué à Mme V. en lui indiquant qu’elle disposait d’un délai de dix jours pour y répondre. A l’issue de ce dernier délai, une ordonnance de clôture immédiate de l’instruction est intervenue, le 10 juillet 2019. Après la clôture de l’instruction, Mme V. a produit un nouveau mémoire, le 30 juillet 2019, qui a été visé mais qui n’a pas été communiqué.

5. Mme V. soutient, d’une part, que le tribunal a méconnu les dispositions de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative en adressant aux parties, le 30 avril 2019, un courrier leur indiquant qu’une clôture d’instruction était susceptible d’intervenir à compter du 20 mai 2019, alors qu’à cette date, aucun mémoire en défense n’avait été produit. Toutefois, cette circonstance ne faisait pas par elle-même obstacle, ainsi qu’il a été dit au point 3, à ce que le tribunal mette en oeuvre la procédure prévue à l’article R. 611-11-1.

6. Mme V. soutient, d’autre part, qu’en lui indiquant par courrier du 13 mai 2019 qu’elle disposait d’un délai de trente jours pour répliquer au mémoire en défense de la commune, tout en refusant de reporter la date, indiquée précédemment comme étant celle du 20 mai 2019, à partir de laquelle la clôture de l’instruction pouvait intervenir, le tribunal a statué selon une procédure irrégulière. Toutefois, il résulte des pièces de la procédure que Mme V. a disposé du délai de trente jours qui lui avait été annoncé pour produire ses observations en réplique, la clôture de l’instruction n’étant au demeurant intervenue que quatre semaines après l’expiration de ce délai. La requérante n’est donc pas fondée à soutenir que la procédure suivie aurait été irrégulière.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

7. En premier lieu, l’autorité compétente, saisie d’une demande en ce sens, peut délivrer au titulaire d’un permis de construire en cours de validité un permis modificatif, tant que la construction que ce permis autorise n’est pas achevée, dès lors que les modifications envisagées n’apportent pas à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même.

8. En relevant que les modifications apportées au projet objet du permis initial en cours de validité se bornaient à prévoir la jonction des deux bâtiments initiaux en une seule construction par un escalier couvert commun, la surélévation d’une partie de la construction en rez-de-chaussée par l’adjonction d’une terrasse d’une surface de plancher de 4 m2, ainsi que le remplacement d’un mur et de deux pare-vues en bois par deux murs en briques et en estimant que ces modifications avaient pu faire l’objet d’un permis modificatif, le tribunal a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

9. En second lieu, il résulte des termes du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal administratif ne s’est pas prononcé sur la régularisation, par le permis modificatif attaqué, du projet initial au regard des dispositions de l’article UD 8.1. du règlement du plan local d’urbanisme. Par suite, Mme V. ne peut utilement soutenir que le tribunal aurait commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en admettant l’existence d’une telle régularisation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme V. n’est pas fondée à demander l’annulation du jugement qu’elle attaque. Ses conclusions tendant à l’annulation, par voie de conséquence, de l’arrêté du 8 juillet 2021 portant transfert du permis de construire contesté ne peuvent, en tout état de cause, qu’être rejetées.

Sur les conclusions au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Montreuil qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme V., la somme de 2 000 € à verser à M. G. et la somme de 2 000 € à verser à la commune de Montreuil, au titre de ces mêmes dispositions.

Décide :

Article 1er : Le pourvoi de Mme V. est rejeté.

Article 2 : Mme V. versera à M. G. et à la commune de Montreuil la somme de 2 000 € chacun, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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