Conseil d’État
N° 339883
ECLI:FR:CESJS:2012:339883.20120706
Mentionné dans les tables du recueil Lebon
6ème sous-section jugeant seule
M. Michel Thenault, rapporteur
CARBONNIER ; SCP FABIANI, LUC-THALER ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ, avocats
lecture du vendredi 6 juillet 2012
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mai et 25 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Dany A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt n° 09BX00342 du 18 février 2010 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant, d’une part, à l’annulation du jugement n° 0800671 du 27 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 22 mai 2007 par lequel le maire de la commune de Saint-Denis a délivré à la S.A.R.L Groupe Baraka Finance un permis de construire six villas correspondant à huit logements sur une parcelle cadastrée AV 412 sise 185, allée des Topazes et, d’autre part, à l’annulation de cet arrêté ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de la S.A.R.L Groupe Baraka Finance et de la commune de Saint-Denis le versement de la somme de 3 000 euros chacune au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Michel Thenault, Conseiller d’Etat,
– les observations de Me Carbonnier avocat de M. A, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler avocat de la société Groupe Baraka Finance, et de la SCP Lyon-Caen, Thiriez avocat de la commune de Saint-Denis de la Réunion ; ;
– les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Carbonnier avocat de M. A, à la SCP Fabiani, Luc-Thaler avocat de la société Groupe Baraka Finance, et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez avocat de la commune de Saint-Denis de la Réunion ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi ;
Considérant que, pour confirmer la tardiveté opposée par le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion à la demande de M. A tendant à l’annulation du permis litigieux, la cour administrative d’appel de Bordeaux a notamment relevé qu’une erreur dans les mentions du panneau d’affichage concernant la hauteur de la construction projetée était sans conséquence sur la régularité de l’affichage, dès lors qu’il comportait les mentions permettant aux tiers d’identifier le permis de construire et d’en consulter le dossier en mairie ;
Considérant qu’aux termes de l’article R. 490-7 du code de l’urbanisme, en vigueur à la date de l’arrêté litigieux : » Le délai de recours contentieux à l’encontre d’un permis de construire court à l’égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes : / a) Le premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l’article R. 421-39 ; / b) Le premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l’article R. 421-39 » ; que l’article R. 421-39 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose : » Mention du permis de construire doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de la décision d’octroi et pendant toute la durée du chantier (… ). » ; qu’aux termes de l’article A. 421-7, alors en vigueur, pris pour l’application de l’article R. 421-39 et dont les dispositions ont été reprises aux articles A. 424-15 et suivants: » L’affichage du permis de construire sur le terrain est assuré par les soins du bénéficiaire du permis de construire sur un panneau rectangulaire dont les dimensions sont supérieures à 80 centimètres. / Ce panneau indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale dudit bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature des travaux et, s’il y a lieu, la superficie du terrain, la superficie du plancher autorisée ainsi que la hauteur de la construction exprimée en mètres par rapport au sol naturel et l’adresse de la mairie où le dossier peut être consulté » ;
Considérant qu’en imposant que figurent sur le panneau d’affichage du permis de construire diverses informations sur les caractéristiques de la construction projetée, les dispositions ainsi rappelées ont eu pour objet de permettre aux tiers, à la seule lecture de ce panneau, d’apprécier l’importance et la consistance du projet ; que la hauteur du bâtiment est au nombre des mentions substantielles que doit comporter cet affichage ; que l’affichage ne peut, en principe, être regardé comme complet et régulier si cette mention fait défaut ou si elle est affectée d’une erreur substantielle, alors qu’aucune autre indication ne permet aux tiers d’estimer cette hauteur ;
Considérant, par suite, qu’en jugeant qu’était sans conséquence sur la régularité de l’affichage la circonstance que la mention de la hauteur du bâtiment aurait été erronée, dès lors que les mentions figurant sur le panneau permettaient d’identifier le permis de construire et d’en consulter le dossier à la mairie, la cour administrative d’appel de Bordeaux a entaché son arrêt d’une erreur de droit ; que M. A est fondé, pour ce motif, à en demander l’annulation ;
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que la commune de Saint-Denis et la société Groupe Baraka Finance demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Saint-Denis et de la société Groupe Baraka Finance le versement à M. A de la somme de 1 500 euros chacune, sur le fondement des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’arrêt du 18 février 2010 de la cour administrative d’appel de Bordeaux est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée devant la cour administrative d’appel de Bordeaux.
Article 3 : La commune de Saint-Denis et la société Groupe Baraka Finance verseront chacune à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint-Denis et de la société Groupe Baraka Finance présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Dany A, à la commune de Saint-Denis et à la S.A.R.L Groupe Baraka Finance.