Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée Hôtelière du Québec a demandé au tribunal administratif de Montreuil d’annuler les décisions du 13 mars 2020, par lesquelles le maire de la commune de Saint Ouen sur-Seine (Seine-Saint-Denis) s’est opposé à sa déclaration préalable DP n° 9397019A0113 portant sur la réhabilitation, la création de volumes et la modification de façades d’un hôtel et d’un commerce situés 60, rue des Entrepôts à Saint-Ouen-sur Seine et a refusé de lui délivrer l’autorisation de travaux n° AT 9307019A0061 correspondante, et d’enjoindre à la commune de lui délivrer l’autorisation de travaux ayant fait l’objet de la demande n° AT 9307019A0061 et de prendre une décision de non opposition à la déclaration préalable DP n° 9397019A0113 ou, à défaut, de réexaminer cette demande d’autorisation et cette déclaration préalable.
Par un jugement n° 2008776 du 7 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a annulé ces deux décisions et a enjoint à la commune de Saint-Ouen-sur-Seine de réexaminer la demande d’autorisation de travaux de la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec dans un délai de trois mois, et de réexaminer la déclaration préalable présentée par la société requérante dans un délai d’un mois.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 décembre 2021 et un mémoire enregistré le 10 mai 2022, la commune de Saint Ouen-sur-Seine représentée par Me Céline Sabattier (Cabinet Peyrical & Sabattier Associés), demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 2008776 du 7 octobre 2021, du tribunal administratif de Montreuil ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec devant le tribunal administratif de Montreuil ;
3°) de mettre à la charge de la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec le versement d’une somme de 2 500 € en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur de fait en jugeant que le refus d’autorisation de travaux était insuffisamment motivé, alors que l’avis de la sous-commission départementale d’accessibilité des personnes handicapées du 12 décembre 2019 était annexé à l’arrêté ;
– les premiers juges ont commis une erreur de droit en regardant comme inapplicable aux déclarations préalables les dispositions de l’article R. 431-23-2 du code de l’urbanisme, relatives à l’obligation de présenter une convention de projet urbain partenarial.
Par des mémoires en défense enregistrés le 15 avril 2022 et le 12 mai 2022, la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec, représentée par Me Bardoul conclut :
1°) au rejet de la requête de la commune de Saint-Ouen-sur-Seine ;
2°) par la voie de l’appel incident, à l’annulation ou, subsidiairement à la réformation du jugement attaqué en ce qu’il s’est limité à enjoindre à la commune de Saint-Ouen-sur-Seine de réexaminer la déclaration préalable présentée par la société requérante dans un délai d’un mois, et à ce qu’il soit enjoint, à la même commune et sous astreinte de 100 € par jour de retard, de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable DP n° 93070 19 A0113 ou, subsidiairement, à ce qu’il lui soit enjoint de réexaminer la déclaration préalable sous astreinte de 100 € par jour de retard, étant précisé que la commune ne pourra exiger la production d’une convention ou d’un extrait de convention de projet urbain partenarial et qu’elle devra faire application des dispositions du plan local d’urbanisme de la commune de Saint-Ouen-sur-Seine en vigueur à la date de la décision annulée ;
3°) et à ce qu’il soit mis à la charge de la commune requérante la somme de 5 000 € en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
– aucun des moyens de la requête n’est fondé ;
– la décision portant opposition à déclaration préalable est insuffisamment motivée ;
– la commune ne pouvait légalement exiger qu’elle produise au dossier de déclaration préalable une convention de projet urbain partenarial, d’une part, parce que les dispositions de l’article R. 431-23-2 du code de l’urbanisme n’exigent tout au plus que la production d’un extrait de cette convention et, d’autre part, parce que la production d’une telle convention n’était en tout état de cause pas exigible, faute pour le projet d’entrer dans le champ d’application d’une telle convention et alors en outre que le dispositif du projet urbain partenarial n’est pas légalement applicable dans la commune et y est dépourvu de toute portée.
L’affaire ayant été appelée une première fois à l’audience du 19 mai 2022, une note en délibéré a été produite le 24 mai 2022 pour la commune de Saint Ouen-sur-Seine, avant radiation et renvoi.
Le 15 juillet 2022, les parties ont été informées, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision de la Cour est susceptible de se fonder sur le moyen d’ordre public, relevé d’office, tiré de ce que la commune n’est pas recevable à relever appel du jugement attaqué en tant qu’il statue sur les conclusions dirigées contre l’arrêté du 13 mars 2020 rejetant la demande d’autorisation de travaux.
La commune de Saint-Ouen-sur-Seine a présenté des observations en réponse à cette communication le 7 septembre 2022, qui ont été communiquées à l’autre partie. La commune soutient que les conclusions de la requête dirigées contre l’arrêté du 13 mars 2020 rejetant la demande d’autorisation de travaux sont recevables.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code de la construction et de l’habitation ;
– le code des relations entre le public et les administrations ;
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. A.,
– les conclusions de M. Doré, rapporteur public,
– et les observations de Me Cereja, substituant Me Sabattier, avocat de la commune de Saint Ouen-sur-Seine et de Me Bardoul, avocat de la SAS Hôtelière du Québec.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée Hôtelière du Québec a demandé au tribunal administratif de Montreuil l’annulation, d’une part, de l’arrêté du maire de Saint Ouen-sur-Seine (Seine Saint Denis) du 13 mars 2020 rejetant sa demande d’autorisation de travaux de réhabilitation, d’aménagement, de création de volumes et de modification de façades d’un hôtel et commerce, situés 60, rue des Entrepôts et, d’autre part, de la décision du 13 mars 2020 par laquelle le maire s’est opposé à sa déclaration préalable DP n° 9397019A0113 déposée le 4 octobre 2019 pour les mêmes travaux, au motif que la société requérante n’avait pas produit les pièces complémentaires qui lui avaient été demandées par lettre du 28 octobre 2019. Par un jugement n° 2008776 du 7 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a annulé ces deux décisions et a enjoint à la commune de Saint-Ouen-sur-Seine de réexaminer la demande d’autorisation de travaux dans un délai de trois mois, et de réexaminer la déclaration préalable présentée par la société requérante dans un délai d’un mois. La commune de Saint-Ouen-sur-Seine relève appel de ce jugement et, par la voie de l’appel incident, la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec demande la réformation de l’injonction prononcée par les premiers juges.
Sur l’appel principal :
En ce qui concerne la décision portant refus d’autorisation de travaux :
2. En vertu de l’article R. 111-19-13 du code de la construction et de l’habitation, en vigueur à la date de la signature de la décision attaquée, les autorisations de construire, d’aménager ou de modifier un établissement recevant le public, prévues à l’article L. 111-8 de ce code, ainsi que les décisions de refus y afférentes, sont délivrées ou prises par le maire au nom de l’Etat. Il suit de là que la commune, ne peut être regardée, sur ce point, comme ayant été partie à l’instance devant le tribunal administratif, mais seulement comme y ayant été appelée à présenter des observations, n’est pas recevable à relever appel du jugement attaqué en tant qu’il statue sur les conclusions dirigées contre l’arrêté du 13 mars 2020 rejetant la demande d’autorisation de travaux. Les conclusions de la requête d’appel sont donc irrecevables, dans cette limite, et doivent être rejetées.
En ce qui concerne la décision portant opposition à déclaration préalable :
S’agissant du motif d’annulation de la décision litigieuse retenu par les premiers juges :
3. La commune de Saint-Ouen-sur-Seine soutient que les premiers juges ont commis une erreur de droit en regardant comme inapplicables aux déclarations préalables les dispositions de l’article R. 431-23-2 du code de l’urbanisme, relatives à l’obligation de présenter une convention de projet urbain partenarial.
4. Aux termes de l’article R. 431-23-2 du code de l’urbanisme : « Lorsque les travaux projetés font l’objet d’une convention de projet urbain partenarial ou portent sur une construction à édifier dans un périmètre de projet urbain partenarial mentionné au II de l’article L. 332-11-3, la demande est accompagnée d’un extrait de la convention précisant le lieu du projet urbain partenarial et la durée d’exonération de la taxe d’aménagement. ». Aux termes de l’article R. 431-36 du code de l’urbanisme, situé au sein de la section 3 du chapitre Ier du titre III intitulée « Déclaration préalable portant sur un projet de construction, sur des travaux sur une construction existante ou sur un changement de destination d’une construction » : « Le dossier joint à la déclaration comprend : / […] / Il est complété, s’il y a lieu, par les documents mentionnés […] aux articles […] R. 431-23-2, […]. ». Il résulte de ces dispositions combinées qu’un extrait d’un extrait de la convention de projet urbain partenarial doit être joint au dossier de déclaration préalable.
5. La commune requérante est donc fondée à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont annulé la décision litigieuse au motif qu’elle ne pouvait légalement exiger, pour l’instruction de la demande présentée par la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec, la production de la convention de projet urbain partenarial ou d’un extrait de celle-ci et, par suite, à demander l’annulation du jugement attaqué sur ce point. Il y a toutefois lieu pour la Cour, saisie par l’effet dévolutif de l’appel, de se prononcer sur les autres moyens articulés par l’intimée à l’encontre de la décision litigieuse.
S’agissant des moyens examinés en vertu de l’effet dévolutif de l’appel :
6. L’illégalité d’une demande de l’administration au pétitionnaire tendant à la production d’une pièce complémentaire qui ne peut être requise est de nature à entacher d’illégalité la décision tacite d’opposition prise en application de l’article R. 423-39 du code de l’urbanisme.
Quant à la motivation de l’arrêté litigieux :
7. La société par actions simplifiée Hôtelière du Québec soutient que la décision litigieuse est insuffisamment motivée, en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et les administrations, en ce qu’elle ne mentionne pas les pièces manquant au dossier.
8. La commune de Saint-Ouen-sur-Seine fait valoir qu’un tel moyen est inopérant, dès lors que la décision contestée se serait substituée à une décision implicite de rejet née le 31 janvier 2020, et qu’elle présenterait ainsi un caractère confirmatif, rendant dès lors inopérant le moyen tiré de son défaut de motivation. Toutefois, une décision expresse survenue postérieurement à la décision implicite la précédant s’y substitue et ne revêt donc pas un caractère purement confirmatif. Le moyen est donc, en tout état de cause, opérant.
9. La décision litigieuse comporte les mentions suivantes : « par lettre du 28/10/2019, nous vous avions demandé de bien vouloir compléter votre dossier. / L’ensemble des pièces n’ayant pas été adressé à la mairie de Saint-Ouen sur Seine, vous êtes réputé avoir renoncer à votre projet. ».
10. En se bornant ainsi à évoquer l’incomplétude du dossier, sans mentionner précisément les pièces qui n’ont pas été transmises aux services communaux, alors que la demande de production de pièces complémentaires en date du 28 octobre 2019 comportait mention de quatorze documents présentés comme manquant, la décision litigieuse ne permet pas à son destinataire de connaître, par sa seule lecture, les motifs de fait que l’administration a retenus pour fonder son appréciation et méconnait ainsi les dispositions combinées des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et les administrations, en vertu desquelles les décisions qui refusent une autorisation doivent être motivées, cette motivation devant comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. La société par actions simplifiée Hôtelière du Québec est donc fondée à soutenir que la décision litigieuse est, sur ce point, entachée d’illégalité.
Quant à l’application du dispositif relatif au contrat de projet urbain partenarial :
11. Aux termes de l’article L. 332-11-3 du code de l’urbanisme : « I. – Dans les zones urbaines […] délimitées par les plans locaux d’urbanisme […], lorsqu’une ou plusieurs opérations d’aménagement ou de construction nécessitent la réalisation d’équipements autres que les équipements propres mentionnés à l’article L. 332-15, une convention de projet urbain partenarial prévoyant la prise en charge financière de tout ou partie de ces équipements peut être conclue entre les propriétaires des terrains, les aménageurs, les constructeurs et : / 3° […] la commune ou l’établissement public compétent en matière de plan local d’urbanisme. […]. / II. – Lorsque des équipements publics ayant vocation à faire l’objet d’une première convention de projet urbain partenarial desservent des terrains autres que ceux mentionnés dans le projet de ladite convention, par décision de leur organe délibérant, la commune ou l’établissement public compétent en matière de plan local d’urbanisme, […], fixe les modalités de partage des coûts des équipements et délimite un périmètre à l’intérieur duquel les propriétaires fonciers, les aménageurs ou les constructeurs qui s’y livrent à des opérations d’aménagement ou de construction participent, dans le cadre de conventions, à la prise en charge de ces mêmes équipements publics, qu’ils soient encore à réaliser ou déjà réalisés, dès lors qu’ils répondent aux besoins des futurs habitants ou usagers de leurs opérations. Les conventions successivement établies peuvent viser des programmes d’équipements publics différents lorsque les opérations de construction attendues dans chaque périmètre de convention ne nécessitent pas les mêmes besoins en équipements. / Le périmètre est délimité par délibération du conseil municipal ou de l’organe délibérant de l’établissement public […] ».
12. En premier lieu, la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec soutient que la décision litigieuse est illégale en tant qu’elle exige la production de la convention de projet urbain partenarial dans son entièreté, alors que les dispositions, citées au point 4, de l’article R. 431-23-2 du code de l’urbanisme ne prévoient que celle d’un « « extrait de la convention précisant le lieu du projet urbain partenarial et la durée d’exonération de la taxe d’aménagement ».
13. Toutefois, l’exigence de la production de l’intégralité de la convention de projet urbain partenarial ne figure pas dans la décision litigieuse mais seulement dans un courrier antérieur, en date du 28 octobre 2019, dans lequel il est demandé à l’intimée de « fournir la convention PUP en raison de la création de surface de plancher SDP (pièces DP 22) ». Le moyen est donc inopérant et doit donc être écarté.
14. En deuxième lieu, la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec soutient que la commune de Saint-Ouen-sur-Seine ne pouvait légalement exiger qu’elle produise au dossier de déclaration préalable une convention de projet urbain partenarial, la production d’une telle convention n’était en tout état de cause pas exigible, faute pour le projet d’entrer dans le champ d’application d’une telle convention eu égard à la nature des travaux en cause
15. Il ressort des pièces du dossier que le projet aboutit à une création de surface nette de 15 m2, cette création résulte pour l’essentiel, en R + 1 et en R + 2, de la fermeture de deux coursives ouvertes sur la cour intérieure.
16. L’article L. 331-1 du code de l’urbanisme institue une taxe d’aménagement perçue notamment par les communes ou établissements publics de coopération intercommunale en vue de financer les objectifs d’urbanisme définis à l’article L. 101-2 du même code. Il résulte des articles L. 331-6 et L. 331-10 du même code que la taxe d’aménagement est assise sur la surface, telle que définie au dernier alinéa de l’article L. 331-10, créée à l’occasion de toute opération d’aménagement, de construction, de reconstruction ou d’agrandissement de bâtiments. Doit être regardée comme un agrandissement une opération ayant pour conséquence une augmentation nette de la surface d’un bâtiment préexistant. Dans ce cas, la taxe d’aménagement est assise sur la surface créée, déduction faite, le cas échéant, de la surface supprimée. Par ailleurs, l’article L. 331-7 du même code dispose que : « Sont exonérées de la part communale ou intercommunale de la taxe d’aménagement : / […] / 6° Les constructions et aménagements réalisés dans les périmètres délimités par une convention de projet urbain partenarial prévue par l’article L. 332 11-3 […]. » et l’article L. 332-11-4 du même code dispose que : « Dans les communes où la taxe d’aménagement a été instituée, les constructions édifiées dans le périmètre délimité par une convention prévue à l’article L. 332 11-3 sont exclues du champ d’application de cette taxe pendant un délai fixé par la convention, qui ne peut excéder dix ans ».
17. Eu égard à la finalité poursuivie par le législateur avec la création du dispositif de projet urbain partenarial, doit être regardée comme une « constructions à édifier » au sens et pour l’application des dispositions précitées de l’article R. 431-23-2 du code de l’urbanisme, toute construction ou tout agrandissement susceptible d’être soumis à la taxe d’aménagement. Par suite, le projet décrit au point 15, qui n’est pas manifestement insusceptible d’être exonéré de la taxe d’aménagement, relève en tout état de cause du champ d’application du projet urbain partenarial. La société par actions simplifiée Hôtelière du Québec n’est donc pas fondée à soutenir que la commune aurait commis une erreur de droit sur ce point.
18. En troisième lieu, la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec soutient que la commune de Saint-Ouen-sur-Seine ne pouvait pas davantage légalement exiger qu’elle produise au dossier de déclaration préalable une convention de projet urbain partenarial dès lors que ce dispositif est dépourvu de toute portée sur le territoire de la commune.
19. La délibération n° CT-19/1211 du 25 juin 2019 du conseil de territoire de l’établissement public territorial Plaine Commune, se borne à définir un périmètre, couvrant environ le quart du territoire communal selon l’estimation présentée par la commune elle-même, et à mentionner dans ses motifs que : « dans le périmètre proposé les besoins en équipements, qui seront affinés par convention en fonction des besoins générés par chaque opération, concernent des groupes scolaires des places en crèche les surcoûts liés au renforcement et ou extension des réseaux la création de voirie », et que : « chaque convention déterminera précisément le ou les équipements sur lequel elle portera ainsi que les modalités financières qui s’y rattachent ». Elle ne comporte ainsi aucune disposition destinée à fixer les modalités de partage des coûts des équipements publics, ni ne mentionne en outre avec une précision suffisante ces équipements, qu’ils soient encore à réaliser ou déjà réalisés. Dès lors, faute de déterminer elle-même les éléments qui, requis par l’article L. 332-11-3 du code de l’urbanisme, sont nécessaires à la mise en oeuvre du projet urbain partenarial dans le périmètre déterminé, elle est ainsi dépourvue de toute portée et n’a donc pu légalement fonder, en l’espèce, l’exigence par la commune de la production d’une convention de projet urbain partenarial.
20. En quatrième lieu, la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec soutient que la commune ne pouvait légalement exiger qu’elle produise au dossier de déclaration préalable une convention de projet urbain partenarial dès lors que la délibération du conseil de territoire de l’établissement public territorial Plaine Commune qui a institué ce dispositif est illégale.
21. De première part, l’illégalité d’un acte administratif, qu’il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d’exception à l’appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l’application du premier acte ou s’il en constitue la base légale. S’agissant d’un acte réglementaire, une telle exception peut être formée à toute époque, même après l’expiration du délai du recours contentieux contre cet acte.
22. Eu égard au lien que les dispositions législatives citées au point 11 impliquent nécessairement entre le périmètre dans lequel a été défini un projet urbain partenarial et les équipements publics au financement desquels les aménageurs sont appelés à contribuer à l’intérieur de ce périmètre, et des règles de fixation de cette participation qui doivent être essentiellement fonction de l’intérêt à la réalisation des équipements ainsi financés des futurs usagers ou occupants des catégories de constructions qu’elles déterminent, l’ensemble des dispositions par lesquelles est institué un projet urbain partenarial présente un caractère réglementaire. Il en est notamment ainsi des délibérations qui ayant pour objet de définir ou de modifier le ou les secteurs d’un projet urbain partenarial ne se bornent pas, ce faisant, à rendre applicables des règles préexistantes mais participent nécessairement à la définition de nouvelles règles.
23. En l’espèce, la délibération n° CT-19/1211 du 25 juin 2019 du conseil de territoire de l’établissement public territorial Plaine Commune, qui est prise sur le fondement des dispositions législatives citées au point 11 vise à mettre en oeuvre, sur la partie du territoire de la commune de Saint-Ouen-sur-Seine dont il détermine le périmètre, le régime du projet urbain partenarial prévu par lesdites dispositions, sur le fondement duquel la commune exige des particuliers la production d’une convention de projet urbain partenarial au titre de l’article R. 431-23-2 du code de l’urbanisme. Alors que la décision querellée se borne, sans se prononcer sur la teneur du projet objet de la déclaration préalable et sa conformité aux règles d’urbanisme en vigueur, à s’y opposer au motif, notamment, de l’absence de production au dossier de demande d’une convention de projet urbain partenarial, la délibération du 25 juin 2019 doit donc être regardée comme la base légale de la décision querellée, dont l’intimée est recevable à contester l’illégalité par voie d’exception.
24. Cette délibération, qui se borne à définir un périmètre, couvrant d’ailleurs le quart du territoire communal selon l’estimation présentée par la commune elle-même, ne comporte, comme il a été déjà dit au point 19, aucune disposition destinée à fixer les modalités de partage des coûts des équipements public ; elle ne mentionne pas davantage avec une précision suffisante ces équipements, qu’ils soient encore à réaliser ou déjà réalisés. Faute de déterminer elle-même les éléments qui, requis par l’article L. 332-11-3 du code de l’urbanisme, sont nécessaires à la mise en oeuvre du projet urbain partenarial dans le périmètre déterminé, elle est ainsi entachée d’incompétence négative et méconnait dès lors les dispositions législatives susmentionnées. Il s’ensuit que, comme le soutient, la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec, elle ne peut en tout état de cause fonder légalement la décision attaquée.
25. Il résulte de ce qui précède que la commune requérante n’est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont prononcé l’annulation de l’opposition à déclaration préalable, laquelle, ainsi qu’il résulte de ce qui précède, est illégale.
Sur l’appel incident :
26. Aux termes du premier alinéa de l’article L. 911-2 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ». Aux termes de l’article L. 600-2 du code de l’urbanisme : « Lorsqu’un refus opposé à une demande d’autorisation d’occuper ou d’utiliser le sol ou l’opposition à une déclaration de travaux régies par le présent code a fait l’objet d’une annulation juridictionnelle, la demande d’autorisation ou la déclaration confirmée par l’intéressé ne peut faire l’objet d’un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d’urbanisme intervenues postérieurement à la date d’intervention de la décision annulée sous réserve que l’annulation soit devenue définitive […]. ». Aux termes de l’article L. 424-3 du même code : « Lorsque la décision rejette la demande ou s’oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / Cette motivation doit indiquer l’intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d’opposition, notamment l’ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l’article L. 421-6. ». Lorsque le juge annule un refus d’autorisation ou une opposition à une déclaration après avoir censuré l’ensemble des motifs que l’autorité compétente a énoncés dans sa décision conformément aux prescriptions de l’article L. 424-3 du code de l’urbanisme ainsi que, le cas échéant, les motifs qu’elle a pu invoquer en cours d’instance, il doit, s’il est saisi de conclusions à fin d’injonction, ordonner à l’autorité compétente de délivrer l’autorisation ou de prendre une décision de non-opposition. Dans un tel cas, l’autorité administrative compétente doit, sous réserve que l’annulation soit devenue définitive et que le pétitionnaire ne dépose pas une demande d’autorisation portant sur un nouveau projet, réexaminer la demande initiale sur le fondement des dispositions d’urbanisme applicables à la date de la décision annulée, en application de l’article L. 600-2 du code de l’urbanisme.
27. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a enjoint à la commune de Saint-Ouen-sur-Seine de réexaminer la déclaration préalable présentée par la société requérante dans un délai d’un mois.
28. En premier lieu, il est constant que la déclaration préalable n’a pas été examinée dans les conditions requises par les dispositions précitées de l’article L. 424-3 du code de l’urbanisme, la commune de Saint-Ouen-sur-Seine s’étant bornée à s’y opposer en se fondant sur la seule incomplétude du dossier de demande, sans se prononcer sur la teneur du projet. Dès lors, la Cour n’est pas tenue d’enjoindre à la commune de prendre une décision de non opposition. En outre, et alors le jugement attaqué ne présente pas un caractère définitif, la commune n’est pas tenue de réexaminer la demande initiale de la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec sur le fondement des dispositions d’urbanisme applicables à la date de la décision annulée. Par suite, les conclusions d’appel incident qui tendent, à titre principal, à ce que la Cour ordonne à la commune requérante de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable DP n° 9397019A0113 du 4 octobre 2019 doivent être rejetées.
29. En second lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 11 à 13 et 17 à 21, relativement à l’illégalité de l’exigence de la production d’une convention de projet urbain partenarial, l’exécution du présent arrêt implique nécessairement, comme le demande la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec dans ses conclusions subsidiaires d’appel incident et sans qu’y fasse obstacle la circonstance que les premiers juges ont déjà prononcé une injonction de réexamen au demeurant contestée devant la Cour par la voie de l’appel incident, qu’il soit enjoint à la commune de Saint-Ouen-sur-Seine de procéder, dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt, au réexamen de sa déclaration préalable sans qu’elle puisse fonder sa décision sur la circonstance que le dossier de demande ne comporte pas de convention ou d’extrait de convention de projet urbain partenarial. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.
Sur les frais du litige :
30. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Ouen-sur-Seine, qui est la partie perdante dans la présente instance, en puisse invoquer le bénéfice. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à sa charge le versement à la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec une somme de 2 000 € sur le fondement des mêmes dispositions.
Décide :
Article 1er : La requête de la commune de Saint-Ouen-sur-Seine est rejetée.
Article 2 : Il est enjoint à la commune de Saint-Ouen-sur-Seine de procéder, dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt, au réexamen de la déclaration préalable DP n° 9397019A0113 présentée par la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec portant sur la réhabilitation, la création de volumes et la modification de façades d’un hôtel et d’un commerce situés 60, rue des Entrepôts à Saint-Ouen-sur Seine, sans que la commune puisse fonder sa décision sur la circonstance que le dossier ne comporte pas de convention ou d’extrait de convention de projet urbain partenarial.
Article 3 : La commune de Saint-Ouen-sur-Seine versera à la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec une somme de 2 000 € en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions d’appel incident de la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Ouen-sur-Seine et à la société par actions simplifiée Hôtelière du Québec.