Les dernières nouvelles

Plan Local d’Urbanisme : Article L600-9 CU, comment régulariser en cours d’instance une procédure de PLU ?

Conseil d’État 

N° 395963    
Publié au recueil Lebon
Section
Mme Mireille Le Corre, rapporteur
Mme Julie Burguburu, rapporteur public
SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT, ROBILLOT ; SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO, avocats

lecture du vendredi 22 décembre 2017

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

M. B…A…a demandé au tribunal administratif de Lille d’annuler pour excès de pouvoir la délibération du 10 février 2012 du conseil municipal de Sempy approuvant le projet de carte communale ainsi que l’arrêté du 16 avril 2012 du préfet du Pas-de-Calais approuvant ce document. Par un jugement n° 1203659 du 3 juillet 2014, le tribunal administratif de Lille a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 14DA01485 du 12 novembre 2015, la cour administrative d’appel de Douai a rejeté l’appel formé par la commune de Sempy contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat les 7 janvier, 6 avril et 27 octobre 2016, la commune de Sempy demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de M. A…la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code de l’environnement ;
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code rural et de la pêche maritime ;
– le code de l’urbanisme ;
– l’arrêté du 29 mars 2004 relatif à la prévention des risques présentés par les silos de céréales, de grains, de produits alimentaires ou de tous autres produits organiques dégageant des poussières inflammables ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Mireille Le Corre, maître des requêtes,

– les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la commune de Sempy et à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, Robillot, avocat de M. A…;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une délibération du 10 février 2012, le conseil municipal de Sempy a approuvé le projet de carte communale qui lui était soumis ; que, par un arrêté du 16 avril 2012, le préfet du Pas-de-Calais a approuvé ce document ; que, par un jugement du 3 juillet 2014, le tribunal administratif de Lille a fait droit à la demande de M. A…tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de la délibération du conseil municipal et, par voie de conséquence, de l’arrêté du préfet, au motif que le conseil municipal s’était prononcé sans que la chambre d’agriculture du Pas-de-Calais et la commission départementale de la consommation des espaces agricoles aient été consultées, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 124-2 du code de l’urbanisme ; que la commune a fait appel de ce jugement et a produit, en cours d’instance, des avis émis le 9 novembre 2014 par la commission départementale de la consommation des espaces agricoles et le 15 janvier 2015 par la chambre d’agriculture, avis qu’elle avait sollicités postérieurement au jugement attaqué afin de régulariser la procédure ; que, par un arrêt du 12 novembre 2015, contre lequel la commune de Sempy se pourvoit en cassation, la cour administrative d’appel de Douai a rejeté son appel, en jugeant que ces avis ne permettaient pas de regarder les décisions attaquées comme ayant été régularisées en application des dispositions du 1° de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de l’arrêt attaqué :  » Si le juge administratif, saisi de conclusions dirigées contre un schéma de cohérence territoriale, un plan local d’urbanisme ou une carte communale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu’une illégalité entachant l’élaboration ou la révision de cet acte est susceptible d’être régularisée, il peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour cette régularisation et pendant lequel le document d’urbanisme reste applicable, sous les réserves suivantes : / 1° En cas d’illégalité autre qu’un vice de forme ou de procédure, pour les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d’urbanisme et les cartes communales, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l’illégalité est susceptible d’être régularisée par une procédure de modification prévue aux articles L. 122-14-1 à L. 122-14-3 ou L. 123-13-1 à L. 123-13-3 ou au cinquième alinéa de l’article L. 124-2 ; / 2° En cas d’illégalité pour vice de forme ou de procédure, le sursis à statuer ne peut être prononcé que si l’illégalité a eu lieu, pour les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d’urbanisme, après le débat sur les orientations du projet d’aménagement et de développement durables. / Si la régularisation intervient dans le délai fixé, elle est notifiée au juge, qui statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / Si, après avoir écarté les autres moyens, le juge administratif estime que le vice qu’il relève affecte notamment un plan de secteur, le programme d’orientations et d’actions du plan local d’urbanisme ou les dispositions relatives à l’habitat ou aux transports et déplacements des orientations d’aménagement et de programmation, il peut limiter à cette partie la portée de l’annulation qu’il prononce.  » ;

3. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.A…, les dispositions de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, qui instituent des règles de procédure qui ne concernent que les pouvoirs du juge administratif en matière de contentieux de l’urbanisme, sont, en l’absence de dispositions expresses contraires, d’application immédiate aux instances en cours, y compris lorsque, comme en l’espèce, les actes attaqués ont été adoptés avant leur entrée en vigueur ;

4. Considérant que ces dispositions ont pour objet de permettre, sous le contrôle du juge, la régularisation d’un vice ayant entaché l’élaboration ou la révision d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme ou d’une carte communale, sous les réserves mentionnées au 2° s’agissant d’un vice de forme ou de procédure ou au 1° s’agissant d’un autre vice, dès lors qu’aucun autre moyen n’est susceptible d’entraîner l’annulation de l’acte attaqué ; que, lorsque le juge estime qu’une telle régularisation est possible, il peut, de sa propre initiative ou à la demande d’une partie, après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur le principe de l’application de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, constater, par une décision avant-dire droit, que les autres moyens ne sont pas fondés et surseoir à statuer jusqu’à l’expiration du délai qu’il fixe pour permettre, selon les modalités qu’il détermine, la régularisation du vice qu’il a relevé ; que le juge peut mettre en oeuvre les pouvoirs qu’il tient de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme pour la première fois en appel, alors même que le document d’urbanisme en cause a été annulé par les premiers juges ;

5. Considérant que, dans le cas où l’administration lui transmet spontanément des éléments visant à la régularisation d’un vice de forme ou de procédure de nature à entraîner l’annulation de l’acte attaqué, le juge peut se fonder sur ces éléments sans être tenu de surseoir à statuer, dès lors qu’il a préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur la possibilité que ces éléments permettent une régularisation en application de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme ; que, toutefois, si les éléments spontanément transmis ne sont pas suffisants pour permettre au juge de regarder le vice comme ayant été régularisé, il peut, dans les conditions rappelées au point 4, notamment après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur le principe de l’application de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, surseoir à statuer en vue d’obtenir l’ensemble des éléments permettant la régularisation ;

6. Considérant, par ailleurs, que, eu égard à l’objet et à la portée des dispositions de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, il appartient à l’autorité compétente de régulariser le vice de forme ou de procédure affectant la décision attaquée en faisant application des dispositions en vigueur à la date à laquelle cette décision a été prise ;

7. Considérant que la cour administrative d’appel de Douai a constaté que ni la chambre d’agriculture, ni la commission départementale de la consommation des espaces agricoles n’avait été consultée sur le projet de carte communale par la commune de Sempy, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 124-2 du code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable à la date des décisions litigieuses ; qu’alors que le vice qu’elle avait ainsi relevé concernait la procédure d’adoption des actes attaqués, la cour s’est fondée sur les dispositions précitées du 1° de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, qui est relatif à la régularisation des vices autres que de forme ou de procédure, pour juger que le vice en cause n’était pas susceptible d’être régularisé ; qu’en se fondant ainsi sur le 1° de cet article, alors que la régularisation qui lui était demandée, qui concernait un vice affectant la procédure d’adoption de la carte communale, ne relevait pas du champ d’application de ces dispositions, la cour a commis une erreur de droit ;

8. Considérant, en outre, que la cour a relevé que l’article R. 124-6 du code de l’urbanisme imposait, dans sa rédaction applicable à la date de son arrêt, que le dossier de l’enquête publique relative à la carte communale comporte les avis émis en application de l’article L. 124-2 du même code, au nombre desquels figurent ceux de la chambre d’agriculture et de la commission départementale de la consommation des espaces agricoles ; qu’elle en a déduit qu’alors même que cette obligation n’existait pas à la date de la décision attaquée, la commune aurait dû, pour procéder à la régularisation, organiser une nouvelle enquête publique ; que la cour, en statuant ainsi, en méconnaissance de la règle énoncée au point 6, a commis une autre erreur de droit ;

9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que la commune de Sempy est fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque ;

10. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sur les moyens dirigés contre la délibération du 10 février 2012 :

En ce qui concerne le défaut de consultation de la chambre d’agriculture et de la commission départementale de la consommation des espaces agricoles :

11. Considérant qu’aux termes de l’article L. 124-2 du code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de la délibération litigieuse :  » Les cartes communales respectent les principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1. / Elles délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l’exception de l’adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l’extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu’elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l’exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles. / Les cartes communales sont approuvées, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement, consultation de la chambre d’agriculture et avis de la commission départementale de la consommation des espaces agricoles prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime, par le conseil municipal et le préfet. Cette commission rend son avis au plus tard deux mois après la transmission du projet de carte par le maire. A défaut, cet avis est réputé favorable. Les cartes communales sont approuvées par délibération du conseil municipal, puis transmises par le maire au préfet qui dispose d’un délai de deux mois pour les approuver. A l’expiration de ce délai, le préfet est réputé avoir approuvé la carte. La carte approuvée est tenue à disposition du public. Le projet de révision d’une carte communale concernant une commune située en dehors du périmètre d’un schéma de cohérence territoriale approuvé et ayant pour conséquence une réduction des surfaces des zones agricoles est soumis pour avis, par la commune, à la commission départementale de la consommation des espaces agricoles. (…)  » ; qu’il résulte de ces dispositions que la chambre d’agriculture et la commission départementale de la consommation des espaces agricoles doivent être consultées sur le projet de carte communale ;

12. Considérant, d’une part, qu’il est constant que la commission départementale de la consommation des espaces agricoles n’avait pas été consultée sur le projet de carte communale à la date à laquelle le conseil municipal a pris la délibération attaquée ;

13. Considérant, d’autre part, que si la commune de Sempy soutient que la chambre d’agriculture avait émis un avis le 3 août 2010, il ressort des pièces du dossier que la chambre d’agriculture n’a été consultée et ne s’est prononcée que sur une demande de dérogation à l’article L. 111-3 du code rural et non sur le projet de carte communale dans son ensemble à la date à laquelle le conseil municipal a pris la délibération attaquée ;

14. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’il a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’il a privé les intéressés d’une garantie ;

15. Considérant que, le 9 novembre 2014, la commission départementale de la consommation des espaces agricoles, saisie par la commune de Sempy, a émis un avis favorable à la carte communale adoptée par la délibération attaquée ; que, dans les circonstances de l’espèce, l’omission de consulter cette commission, qui ne constituait pas une garantie, n’a pas eu d’influence sur le sens de la délibération attaquée ; qu’en revanche, la chambre d’agriculture, saisie par la commune, a émis, le 15 janvier 2015, un avis défavorable sur la carte communale adoptée par la délibération attaquée ; que, dans ces conditions, eu égard aux conséquences du projet de carte communale sur les réductions d’espaces agricoles et naturels au profit de l’urbanisation du bourg, notamment à proximité d’exploitations, l’omission de la consultation de la chambre d’agriculture avant l’adoption de la carte communale a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la délibération du conseil municipal de Sempy ;

En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la délibération du 10 février 2012 :

S’agissant de la légalité externe :

16. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée :  » Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l’ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée. Elle est adressée par écrit, au domicile des conseillers municipaux ou, s’ils en font la demande, envoyée à une autre adresse ou transmise de manière dématérialisée.  » ; qu’aux termes de l’article L. 2121-11 du même code :  » Dans les communes de moins de 3 500 habitants, la convocation est adressée trois jours francs au moins avant celui de la réunion (…)  » ; que si M. A…soutient qu’il n’est pas établi que les conseillers municipaux ont été régulièrement convoqués à la séance du 10 février 2012, il ressort des pièces du dossier que la convocation a été déposée le 3 février 2012, dans le délai requis, au domicile des conseillers municipaux et affichée en mairie ; qu’il suit de là que le moyen tiré du caractère irrégulier de la convocation des conseillers municipaux doit être écarté ;

17. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A…soutient que la délibération ayant approuvé la carte communale n’a pas été affichée dans des conditions conformes aux exigences de l’article R. 124-8 du code de l’urbanisme, une telle circonstance, à la supposer établie, serait en tout état de cause sans incidence sur sa légalité ; que, par suite, ce moyen ne peut qu’être écarté ;

18. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article R. 123-14 du code de l’environnement, applicable à la procédure d’élaboration des cartes communales, dans sa rédaction en vigueur à la date de la délibération attaquée :  » Un avis portant ces indications à la connaissance du public est, par les soins du préfet, publié en caractères apparents quinze jours au moins avant le début de l’enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans le ou les départements concernés. (…)/ Quinze jours au moins avant l’ouverture de l’enquête et durant toute la durée de celle-ci, cet avis est publié par voie d’affiches et, éventuellement, par tous autres procédés, dans chacune des communes désignées par le préfet. Cette désignation porte au minimum sur toutes les communes sur le territoire desquelles l’opération doit avoir lieu. L’accomplissement de cette mesure de publicité incombe au maire et est certifié par lui. (…)  » ; que l’arrêté municipal organisant l’enquête, en date du 4 avril 2011, prévoyait que l’enquête publique se tiendrait du 30 avril 2011 au 30 mai 2011 inclus et que le dossier serait mis à la disposition du public à la mairie de la commune durant cette période ; qu’il ressort des pièces du dossier, et en particulier du rapport du commissaire enquêteur, que l’avis d’enquête a été affiché en mairie et dans d’autres emplacements sur le territoire de la commune, a été publié dans les délais prévus par l’arrêté dans la presse, dans  » La voix du Nord « , les 14 avril et 4 mai, dans  » Le journal de Montreuil  » les 13 avril et 4 mai 2011, et a été distribué dans les boîtes aux lettres des habitants de la commune ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l’avis d’enquête publique n’a pas été régulièrement affiché et publié manque en fait ;

19. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes de l’article R. 124-6 du code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée :  » Le projet de carte communale est soumis à enquête publique par le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent dans les formes prévues par les articles R. 123-7 à R. 123-23 du code de l’environnement. (…) / Le dossier est composé du rapport de présentation, du ou des documents graphiques. Il peut être complété par tout ou partie des documents mentionnés à l’article R. 121-1  » ; qu’il résulte de ces dispositions que le maire est compétent pour soumettre le projet de carte communale à enquête publique ; que, par suite, M. A… ne saurait utilement soutenir que l’enquête publique n’a pas été ouverte par le préfet ; qu’il ressort des pièces du dossier que le dossier d’enquête publique était composé du rapport de présentation du projet de carte communale et de plusieurs documents cartographiques ; qu’ainsi, le moyen tiré de ce que ce dossier n’était pas complet doit être écarté ; que M. A…ne saurait utilement soutenir qu’il n’était pas conforme aux dispositions de l’article R. 123-6 du code de l’environnement, qui n’est pas applicable aux cartes communales ; que le moyen tiré de ce que le rapport de présentation ne respecte pas les prescriptions légales n’est pas assorti des précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé ;

20. Considérant, en cinquième lieu, qu’aux termes de l’article R. 123-17 du code de l’environnement dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée :  » Pendant la durée de l’enquête, les appréciations, suggestions et contre-propositions du public peuvent être consignées sur le registre d’enquête tenu à leur disposition dans chaque lieu où est déposé un dossier ; ce registre, établi sur feuillets non mobiles, est coté et paraphé par le commissaire enquêteur, le président de la commission d’enquête ou un membre de celle-ci./ Les observations peuvent également être adressées par correspondance au commissaire enquêteur ou au président de la commission d’enquête au siège de l’enquête ; elles y sont tenues à la disposition du public. En outre, les observations du public sont reçues par le commissaire enquêteur ou par un membre de la commission d’enquête, aux lieux, jours et heures qui auront été fixés et annoncés dans les conditions prévues aux articles R. 123-13 et R. 123-14.  » ; qu’aux termes de l’article R. 123-22 du code de l’environnement dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée :  » (…) Le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l’enquête et examine les observations recueillies. Le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l’opération. (…)  » ; qu’il ressort des pièces du dossier que les observations de M. A…sont mentionnées dans le rapport d’enquête publique ; que le commissaire-enquêteur, qui n’était pas tenu de répondre à chaque observation relative au caractère inconstructible de certaines parcelles, y a apporté une réponse suffisante en estimant qu’il y avait lieu de  » prendre en compte, dans la mesure du possible et dans le respect des réglementations en vigueur, les demandes d’extension des zones urbanisables de manière d’une part à encourager les constructions et extensions sur la commune et d’autre part à éviter des procédures de révision ou de modification ultérieures  » ; qu’il suit de là que les moyens tirés de ce que les observations du requérant n’ont pas figuré au rapport d’enquête publique et qu’il n’y a pas été répondu doivent être écartés ;

S’agissant de la légalité interne :

21. Considérant, en premier lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient M.A…, c’est sans erreur de fait que la parcelle ZC 69, située à l’extrémité de la zone urbanisée dans les parties agricoles de la commune, n’a pas été regardée comme constituant une  » dent creuse  » dans l’urbanisation de la commune ; que si M. A…soutient que cette parcelle n’est exposée que de manière limitée et ponctuelle aux projections de poussières provenant d’un silo agricole voisin, lequel ne génèrerait pas de nuisance  » anormale  » et n’est pas répertorié comme une installation classée pour la protection de l’environnement, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’appréciation portée par le conseil municipal sur les nuisances provoquées par ce silo sur la parcelle en cause est entachée sur ce point d’une erreur de fait ; que si M. A…soutient que le préfet s’est fondé sur des éléments erronés pour prendre son arrêté, ce moyen est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la délibération du conseil municipal ;

22. Considérant, en deuxième lieu, que le conseil municipal ne s’est pas fondé sur l’article 6 de l’arrêté du 29 mars 2004 relatif à la prévention des risques présentés par les silos de céréales, de grains, de produits alimentaires ou de tout autre produit organique dégageant des poussières inflammables pour arrêter le classement de la parcelle cadastrée ZC 69 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la délibération litigieuse est entachée d’une erreur de droit pour avoir fait application de l’article 6 de cet arrêté alors qu’il ne concernerait que les nouvelles installations ne peut qu’être écarté ;

23. Considérant, en troisième lieu, que, eu égard à la situation de la parcelle cadastrée ZC 69, contigüe à un silo agricole et située en dehors des zones urbanisées, ainsi qu’aux souhaits de la commune, mentionnés dans la délibération litigieuse,  » de préserver en priorité les prairies entourées de haies, en concentrant son développement le long des voies de circulation existantes, en vue de ne pas dénaturer les paysages environnants  » et d’assurer que les extensions de l’urbanisation soient  » limitées afin de préserver les fenêtres vertes au sein du village « , il ne ressort pas des pièces du dossier que le classement de la parcelle ZC 69 en zone inconstructible par la délibération litigieuse serait entachée d’erreur manifeste d’appréciation, alors même que des constructions ont été édifiées par le passé sur des parcelles proches ou que d’autres parcelles, plus éloignées, ont fait l’objet d’un classement différent ;

Sur les moyens dirigés contre l’arrêté préfectoral du 16 avril 2012 :

24. Considérant, en premier lieu, que l’arrêté du 16 avril 2012 a été signé par M. Jacques Witkowski, secrétaire général de la préfecture du Pas-de-Calais qui avait reçu délégation de signature en la matière par un arrêté du 10 mars 2011 du préfet du Pas-de-Calais régulièrement publié ; que par suite, le moyen tiré de ce que l’arrêté attaqué aurait été pris par une autorité incompétente doit être écarté ;

25. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A…soutient que l’arrêté n’a pas été affiché dans des conditions conformes aux exigences de l’article R. 124-8 du code de l’urbanisme, cette circonstance, à la supposer établie, serait, en tout état de cause, sans incidence sur sa légalité ; que, par suite, ce moyen ne peut qu’être écarté ;

26. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de ce que l’arrêté attaqué est illégal en raison, d’une part, de l’erreur manifeste d’appréciation dont serait entaché le classement par la carte communale de la parcelle cadastrée ZC 69 en zone inconstructible, d’autre part, de l’erreur de droit qui résulterait de l’application de l’arrêté du 29 mars 2004 précité, doivent être écartés pour les mêmes raisons que celles ayant conduit à écarter les mêmes moyens dirigés contre la délibération attaquée du conseil municipal de Sempy ;

27. Considérant qu’il résulte de tout ce qui vient d’être dit qu’aucun des moyens présentés contre la délibération attaquée autre que celui tiré du vice de procédure relevé au point 15 de la présente décision n’est fondé ; que, s’agissant de l’arrêté préfectoral attaqué, aucun moyen autre que celui tiré de l’annulation par voie de conséquence de l’annulation de la délibération attaquée qu’il approuve, n’est fondé ;

Sur le sursis à statuer :

28. Considérant que le vice mentionné au point 15 de la présente décision, tiré de ce que la chambre d’agriculture n’a pas été consultée sur le projet de carte communale en méconnaissance des dispositions de l’article L. 124-2 du code de l’urbanisme, est susceptible de régularisation en application des dispositions de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme ; que si la commune de Sempy a produit l’avis de la chambre d’agriculture, en date du 15 janvier 2015, qu’elle avait spontanément pris l’initiative de solliciter, comme elle pouvait le faire, ainsi qu’il a été dit au point 5 de la présente décision, contrairement à ce que soutient M.A…, il ressort des pièces du dossier que cet avis est défavorable au projet de carte communale approuvé par la délibération attaquée ; que seule une nouvelle délibération du conseil municipal confirmant la délibération attaquée approuvant le projet de carte communale, au vu de cet avis, est de nature à permettre la régularisation du vice relevé ;

29. Considérant que, par une lettre du président de la 6ème chambre de la section du contentieux du Conseil d’Etat en date du 18 octobre 2017, les parties ont été invitées à présenter leurs observations dans le cas où, après cassation, le Conseil d’Etat déciderait de régler l’affaire au fond et de faire application des dispositions de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme ; qu’il y a lieu, en l’espèce, en application de ces dispositions, de surseoir à statuer sur l’appel de la commune contre le jugement du tribunal administratif annulant la délibération du conseil municipal et, par voie de conséquence, l’arrêté du préfet pendant un délai de trois mois, en vue de la régularisation de la délibération attaquée, afin de permettre à la commune de Sempy de procéder, au vu de l’avis qu’elle a déjà recueilli de la chambre d’agriculture, à une nouvelle délibération de son conseil municipal sur la carte communale telle qu’elle a été arrêtée par la délibération attaquée ;

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Douai en date du 12 novembre 2015 est annulé.
Article 2 : Il est sursis à statuer sur l’appel de la commune de Sempy jusqu’à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, imparti à la commune de Sempy pour notifier au Conseil d’Etat une délibération de son conseil municipal confirmant l’approbation de sa carte communale au vu de l’avis émis par la chambre d’agriculture du Pas-de-Calais.
Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n’est pas expressément statué par la présente décision sont réservés jusqu’en fin d’instance.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Sempy, à M. B…A…et au ministre de la cohésion des territoires.

Regardez aussi !

Plan Local d’Urbanisme : le règlement peut-il imposer ou interdire des matériaux précis ? (non)

Documents d’urbanisme et obligation d’utiliser certains matériaux et structures 2484. − 1er septembre 2022. − …