Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

D’une part, l’association « Entre Save et Seygouade », Mme T== M== et Mme G== M==, d’autre part, l’association de défense et de l’amélioration de la qualité de la vie en vallée Save et de Gesse (ADAQ VIE), M. et Mme B== L==, M. et Mme J==-L== M==, M. et Mme J== D== et M. P== M==, ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler l’arrêté du 10 avril 2009 du préfet de la Haute-Garonne autorisant la SARL Dragages Garonnais à exploiter une carrière de calcaire et une installation de criblage concassage sur le territoire de la commune de Montmaurin.

Par un jugement n° 0902766 et 0904248 du 24 octobre 2013, le tribunal administratif de Toulouse a admis l’intervention de l’association Nature Comminges et annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 décembre 2013 et 12 septembre 2014, la SARL Dragages Garonnais, représentée par Me Izembard, demande à la cour :

1°) à titre principal, d’annuler ce jugement du 24 octobre 2013 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) à titre subsidiaire, de prescrire une modification du périmètre exploitable par abandon de la phase 1 ou de toute emprise sensible ;

3°) de mettre à la charge solidaire des intimés la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

…………………………………………………………………………………………….

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 10 avril 2009, le préfet de la Haute-Garonne a autorisé la SARL Dragages Garonnais à exploiter une carrière de calcaire et une activité de criblage concassage dans la commune de Montmaurin au lieu-dit « Coume day Houquat et Gaüsere ». Saisi de demandes d’annulation présentées d’une part, par l’association « Entre Save et Seygouade », Mme T== M== et Mme G== M==, d’autre part, par l’association de défense et de l’amélioration de la qualité de la vie en vallée Save et de Gesse (ADAQ VIE), M. et Mme B== L==, M. et Mme J==-L== M==, M. et Mme J== D== et M. P== M==, le tribunal administratif de Toulouse, par jugement n° 0902766 et 0904248 du 24 octobre 2013, a admis l’intervention de l’association Nature Comminges et annulé cet arrêté. La société Dragages Garonnais relève appel de ce jugement.


Sur la régularité du jugement :

2. L’association « Entre Save et Seygouade », Mme M== et Mme M== ont saisi le tribunal administratif de Toulouse d’une demande collective d’annulation de l’arrêté du 10 avril 2009 du préfet de la Haute-Garonne autorisant la société Dragages Garonnais à exploiter cette carrière. D’une part, si cette demande était irrecevable en tant qu’elle émanait de l’association « Entre Save et Seygouade » dont l’objet statuaire, tel que défini à l’article 2 de ses statuts, ne lui donnait pas intérêt à agir à l’encontre de cet arrêté, Mmes M== et M== avaient, en raison de la proximité entre leur maison d’habitation et le terrain d’emprise de la carrière, qualité leur donnant intérêt à agir à l’encontre de l’arrêté autorisant l’exploitation de celle-ci. Par suite, en faisant droit aux conclusions à fin d’annulation de cet arrêté et en ne précisant pas dans le dispositif du jugement que les conclusions étaient irrecevables en tant qu’elles émanaient de l’association « Entre Save et Seygouade », les premiers juges n’ont entaché leur jugement d’aucune irrégularité. D’autre part, la contestation de la condamnation de l’Etat à verser néanmoins à cette association une somme en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative relève de la contestation au fond de la mise en œuvre de ces dispositions et non de l’examen de la régularité du jugement. Par suite, la société Dragages Garonnais n’est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d’irrégularité.

Sur l’intervention de l’association Nature Comminges :

3. L’association Nature Comminges dont l’objet social est « la protection, la sauvegarde, l’enrichissement et la connaissance de la nature dans le Comminges », justifie d’un intérêt à la confirmation du jugement attaqué annulant l’arrêté du 10 avril 2009 du préfet de la Haute-Garonne. Dès lors, son intervention est recevable.

Sur la légalité de l’arrêté du 10 avril 2009 :

4. Aux termes de l’article R. 512-6 du code de l’environnement : « I. – A chaque exemplaire de la demande d’autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : 4° L’étude d’impact prévue à l’article L. 122-1 dont le contenu, par dérogation aux dispositions de l’article R. 122-3, est défini par les dispositions de l’article R. 512-8 ». L’article R. 512-8 précise que l’étude d’impact « présente successivement : / 1° Une analyse de l’état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que sur les biens matériels et le patrimoine culturel susceptibles d’être affectés par le projet ; / 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents de l’installation sur l’environnement et, en particulier, sur les sites et paysages, la faune et la flore, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l’agriculture, l’hygiène, la santé, la salubrité et la sécurité publiques, sur la protection des biens matériels et du patrimoine culturel. Cette analyse précise notamment, en tant que de besoin, l’origine, la nature et la gravité des pollutions de l’air, de l’eau et des sols, le volume et le caractère polluant des déchets, le niveau acoustique des appareils qui seront employés ainsi que les vibrations qu’ils peuvent provoquer, le mode et les conditions d’approvisionnement en eau et d’utilisation de l’eau ; / / 4° Les mesures envisagées par le demandeur pour supprimer, limiter et, si possible, compenser les inconvénients de l’installation ainsi que l’estimation des dépenses correspondantes. Ces mesures font l’objet de descriptifs précisant les dispositions d’aménagement et d’exploitation prévues et leurs caractéristiques détaillées. ».

5. En premier lieu, l’étude d’impact comporte, aux pages 95 et 97, dans son chapitre relatif à l’analyse de l’état initial du site et de son environnement, un paragraphe 1.9.6 intitulé « patrimoine culturel et archéologique » dans lequel est mentionnée la présence sur le territoire de la commune de Montmaurin de deux sites classés, de la villa gallo-romaine des 2ème et 4ème siècles, située au lieu-dit Lassalles à plus de 2 kilomètres du projet, et de l’ensemble de quatre gisements préhistoriques de l’époque du Neandertal, situés aux lieux-dits Maï Caoudéré, Brouca et Coustalats à plus d’un kilomètre du projet. Il fait également état du site classé constitué par un ensemble de grottes et abris préhistoriques de la vallée de la Save situé dans la commune voisine de Lespugue à plus de 500 mètres du projet. Cette étude fait part de la consultation de la direction régionale des affaires culturelles de Midi-Pyrénées lors de l’élaboration du dossier et de la teneur des informations recueillies auprès de ce service qui a précisé « qu’aucun site ou vestige archéologique n’ont été recensés sur l’emprise du projet. Toutefois le site étant localisé dans un massif calcaire présentant les mêmes caractéristiques géologiques et géomorphologiques que les sites paléolithiques classés, le risque archéologique est non nul ». Enfin, elle rappelle que ce même service sera consulté lors de l’instruction de la demande d’autorisation et que des prescriptions archéologiques pourront être préconisées. Dans son paragraphe 9.9.3 intitulé « impacts sur le patrimoine culturel et archéologique » elle indique que « bien qu’aucun vestige archéologique n’ait été signalé dans l’emprise du projet de carrière, il est tout de même possible que de telles découvertes puissent être faites lors des travaux d’extraction » et que si tel était le cas, toute découverte fortuite lors des travaux de décapage ou d’extraction sera immédiatement signalée au maire et au service régional de l’archéologie. Elle rappelle également que ce projet est susceptible d’entrer dans le champ d’application du décret du 3 juin 2004 relatif aux procédures administratives et financières en matière d’archéologie préventive et que le préfet de région sera saisi à ce titre. Enfin, elle mentionne que « la nature et l’importance du patrimoine archéologique éventuellement reconnus à la suite d’une procédure d’évaluation spécifique pourront appeler de la part de l’Etat une prescription de conservation ». Ni la mention dans un carnet de notes de M. G== F==, inventeur de la villa gallo-romaine de Montmaurin, versé aux archives départementales de la Haute-Garonne, de la présence de ruines d’un château dans le bois de Mirepoix observées en mars 1954 ni celle, dans un numéro de la revue de Comminges en note de bas de page d’un article consacré aux « présences gauloises à Montmaurin-Lespugue », du château féodal de Montmaurin situé à la cote 376 « dont les ruines viennent d’être détruites par une carrière » ne peuvent être regardées comme établissant de manière suffisamment certaine la présence de tels vestiges dans le périmètre de l’exploitation. Les publications scientifiques et prises de position de scientifiques relevant la très forte probabilité de vestiges préhistoriques, produites par les intimés, sont postérieures à la réalisation de l’étude d’impact et il ne résulte pas de l’instruction que d’autres publications avaient alors fait état de la présence de vestiges dans ce périmètre. Enfin, la circonstance que, postérieurement à l’enquête publique, dans le cadre du diagnostic archéologique prescrit par le préfet de la Haute-Garonne le 17 janvier 2008, des vestiges archéologiques aient été découverts n’était pas, en l’espèce, de nature à affecter la régularité de l’étude d’impact jointe au dossier soumis à enquête publique.

6. En deuxième lieu, l’étude d’impact comporte pages 94 et 95 une description détaillée du réseau routier pris en compte dans l’étude. Celle-ci décrit ainsi en particulier la sortie de la carrière sur la route départementale n° 69 c qui sera déplacée pour être située dans une ligne droite de plus de 300 mètres et les caractéristiques de cette route entre l’accès de la carrière et l’embranchement avec la RD 633 après le franchissement du pont de la Seygouade. Elle précise que la largeur de chaussée et d’accotements sera suffisante pour permettre en tout point le croisement des camions, et décrit les caractéristiques de largeur de chaussée au droit de ce pont et sur ce pont où le croisement sera également possible. Elle mentionne également les caractéristiques du carrefour entre les deux routes départementales et indique que la visibilité y est suffisamment bonne pour permettre une entrée et une sortie des poids-lourds de la carrière sans gêner le trafic même en l’absence d’un « tourne à gauche ». Elle décrit ensuite les caractéristiques de la RD 633 tant en direction de Blajan qu’en direction de Saint-Plancard qui sont adaptées à un trafic important et qualifie cette route de très peu accidentogène, seuls trois accidents y ayant été recensés durant les cinq années précédant l’étude. Elle comporte en outre page 147, la description des travaux qui seront effectués pour sécuriser l’accès de la carrière. Il est vrai que le département de la Haute-Garonne, dans son avis du 4 avril 2008, a estimé nécessaires, outre la modification de l’accès de la carrière, la prise en charge par l’exploitant de la mise en place d’un revêtement à grosse granulométrie sur la RD 69c, de l’élargissement et du renforcement de la chaussée de cette voie, du redimensionnement des fossés d’assainissement et d’évacuation des eaux, d’une étude du franchissement du pont de Seygouade et de l’adaptation de celui-ci au trafic supplémentaire, ainsi que des aménagements de sécurité au carrefour entre les deux routes départementales 633 et 69c. Toutefois, ni les photographies produites en première instance prises lors du croisement entre un poids-lourd et un autocar sur la RD 69c, qui démontrent la faisabilité d’un tel croisement compte tenu de la largeur de ses accotements sur lesquels l’un des deux véhicules peut se ranger, ni les photographies prises par le service incendie et secours pendant une intervention sur un accident survenu sur la RD 633, ni celles de l’intersection entre les deux routes départementales n’établissent que l’itinéraire devant être emprunté par les camions de la carrière présente des dangers particuliers qu’il aurait été nécessaire d’identifier dans l’étude d’impact et pour lesquels il aurait convenu de présenter les travaux envisagés pour y remédier. Les photographies du soubassement du pont de Seygouade ne suffisent pas davantage à établir que la structure de ce pont ne permettrait pas la circulation des camions de la carrière alors qu’il n’est aucunement fait état de ce que cette voie connaîtrait des restrictions d’usage. Enfin, aucune des photographies produites par les intimés quant aux caractéristiques de la RD 633 n’établissent le caractère accidentogène de celle-ci y compris dans la traversée du bourg de Blajan alors surtout que seule une partie du trafic induit par l’exploitation de la carrière traversera ce bourg. Il ne résulte pas de l’instruction que l’étude d’impact, qui comporte en outre six photographies des principaux points des axes de circulation devant être empruntés par les camions de la carrière, ait procédé à une description erronée ou insuffisante de l’état initial des infrastructures routière ou des travaux à effectuer pour remédier aux incidences de l’exploitation de la carrière sur le réseau routier emprunté. Par ailleurs, l’étude d’impact ne présente aucun caractère lacunaire pour avoir apprécié les effets de l’exploitation sur le trafic routier en s’appuyant exclusivement sur un comptage réalisé par la DDE en 2003 concernant la RD 633, sans réaliser un comptage sur la RD 69 c dès lors qu’il est constant que les poids-lourds de la carrière n’emprunteront cette dernière que sur une distance de l’ordre de 450 mètres. Enfin, si des chiffres différents ont pu être communiqués au commissaire-enquêteur quant à l’accidentologie sur la RD 633, il résulte de l’instruction que ces derniers sont relatifs à une période différente et, ne font état d’un nombre d’accidents qui, bien que supérieur à celui mentionné dans l’étude d’impact, ne révèle pas le caractère accidentogène de cette route départementale. Par suite les explications données par la société pétitionnaire en réponse aux demandes du commissaire-enquêteur sur ce point ne révèlent aucune lacune de l’étude d’impact et ne justifiaient pas l’ouverture d’une nouvelle enquête publique pour être portées à la connaissance du public.

7. En troisième lieu, les nuisances sonores ont été étudiées dans l’étude d’impact qui identifie les principales sources de bruit qui proviendront de l’exploitation comme étant celles émises par les différents engins utilisés tels que pelles et dumpers, le fonctionnement de l’installation de criblage-concassage, le fonctionnement du chargeur, la circulation des camions et les manœuvres des engins. Elle indique que, sur des exploitations similaires, le niveau sonore de l’ensemble de ces activités peut être estimé à 60 à 62 dBA à 30 mètres, de 49,5 à 51.5 dBA à 100 mètres et de 43.5 à 45.5 à 300 mètres. Elle précise qu’en raison du positionnement de l’installation de traitement sur le carreau de la carrière, en fort décaissement par rapport aux terrains adjacents, les niveaux sonores pour les différentes habitations du secteur pourront être atténués jusqu’à près de 30 dBA. Elle mentionne que « le bruit occasionné par les tirs de mines sera important mais bref » et que « ces caractéristiques causeront toutefois un effet de surprise pour le voisinage qui tend à accentuer sa perception ». Elle comporte des tableaux des niveaux sonores induits par l’activité et des émergences sonores dont la méthodologie de calcul est précisée et sur lesquels sont portés, outre le nom du lieu-dit, la distance minimale du lieu d’extraction et de celui de l’installation, les bruits induits par l’extraction et l’installation ainsi que l’atténuation minimale liée à la topographie, le bruit induit par la totalité de l’activité, enfin le niveau de bruit ambiant, de bruit induit par l’ensemble de l’activité, Un paragraphe est en outre consacré aux niveaux sonores en limite de propriété. L’étude présente, également, les mesures de protection qui seront mises en œuvre qui consistent essentiellement à positionner l’installation de traitement sur le carreau de la carrière, à utiliser les engins conformes aux règlementations en vigueur, au maintien des pistes en bon état et à la limitation à 20 kilomètres par heure de la vitesse de circulation. Enfin, un tableau rappelle les seuils règlementaires en matière d’émergence et conclut que l’émergence maximale qui sera de l’ordre de 2dBA reste en dessous de ces seuils. Ainsi l’étude d’impact comportait les éléments nécessaires en ce qui concerne les nuisances sonores lesquelles, contrairement à ce qui est soutenu, ont tenu compte des bruits résultant de l’installation de broyage-concassage et n’avaient pas à intégrer les tirs de mines du fait de leur caractère seulement ponctuel. La circonstance qu’une simulation des émergences ait été également présentée pour un autre point de mesure lors de la réunion publique, laquelle a vocation à répondre aux questions particulières que peuvent se poser les personnes présentes, n’établit pas que l’étude d’impact présentait un caractère lacunaire alors que l’émergence ainsi présentée lors de cette réunion, bien que supérieure à celle des autres points mentionnés dans l’étude d’impact dont le choix s’expliquait par la volonté de mettre l’accent sur les habitations les moins soumises au bruit ambiant, respectait néanmoins largement les seuils réglementaires.

8. Il résulte de ce qui précède que c’est à tort que le tribunal administratif de Toulouse s’est fondé sur le caractère lacunaire de l’étude d’impact pour annuler l’arrêté du 10 avril 2009, du préfet de la Haute-Garonne.

9. Toutefois, il appartient à la cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par les intimés devant le tribunal ou devant elle.

Sur la procédure :

10. En premier lieu, l’étude d’impact, à laquelle était en outre jointe une expertise écologique réalisée par Entoma, comporte une présentation du contexte général faisant état de la présence proches de plusieurs zones naturelles d’intérêt écologique faunistique et floristique (ZNIEFF) et de sa localisation au sein de la ZNIEFF n° 730011401 « Gorges de la Save ». Elle indique les espèces floristiques ou faunistiques d’intérêt écologique présentes sur le site ou potentiellement présentes compte tenu des caractéristiques de la zone. Elle présente également pages71 à 79 une analyse écologique détaillée de la zone d’étude tant en ce qui concerne la flore et les formations végétales que la faune ainsi que, pages 79 à 81 des éléments sur la bio-évaluation écologique et sur la fonctionnalité écologique globale. Les impacts de l’exploitation sur la faune, la flore et les milieux naturels sont recensés pages 117 à 119 et font état d’un impact négligeable de l’exploitation sur le boisement frais de fond de vallon, d’un impact moyen sur la pelouse calcicole, de l’absence d’effet de la suppression d’une petite cavité sur le bon accomplissement des cycles biologiques des populations de chiroptères, enfin d’un impact très faible sur l’habitat de forêt rivulaire. Elle comporte également pages 119 à 123 la présentation des mesures et recommandations à mettre en œuvre pour préserver au maximum les composantes naturelles d’intérêt. Ainsi cette étude d’impact répondait aux exigences posées par l’article R. 512-8 du code de l’environnement. La circonstance que la société se soit en outre engagée à réaliser un « suivi chiroptère » dont la méthodologie précise que la première année sera dédiée essentiellement à la réalisation d’un état initial des espèces fréquentant le site, ne démontre pas que l’étude d’impact aurait été lacunaire sur ce point. Par voie de conséquence, le moyen tiré de l’irrégularité de l’avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites en raison du caractère insuffisant de l’information apportée par l’étude d’impact doit être écarté.

11. En deuxième lieu, il résulte des dispositions du 1er alinéa de l’article R. 312-4 du code forestier alors en vigueur que lorsqu’une demande de défrichement porte sur des bois appartenant à une collectivité territoriale, l’autorisation est accordée par le préfet après avis de l’Office national des forêts. En l’espèce, le préfet de la Haute-Garonne a, par arrêté du 10 mars 2008, autorisé le défrichement des parcelles incluses dans le périmètre de la carrière et appartenant à la commune de Montmaurin après avoir recueilli l’avis de l’office national des forêts. Par suite, alors même que cet arrêté ne vise pas les dispositions du code forestier applicables aux bois des collectivités et de certaines personnes morales, le moyen tiré de la violation des dispositions sus-rappelées du code forestier ne peut, en tout état de cause, qu’être écarté.

12. En troisième lieu, l’article R. 512-20 du code de l’environnement dispose : « Le conseil municipal de la commune où l’installation projetée doit être implantée et celui de chacune des communes mentionnées au III de l’article R. 512-14 sont appelés à donner leur avis sur la demande d’autorisation dès l’ouverture de l’enquête. Ne peuvent être pris en considération que les avis exprimés au plus tard dans les quinze jours suivant la clôture du registre d’enquête ». La commune de Montmaurin, bien qu’elle ait été appelée à donner son avis en application des dispositions de l’article 4 de l’arrêté d’ouverture d’enquête publique, qui s’est déroulée du 4 mars au 17 avril 2008, ne s’est pas prononcée dans le délai fixé par les dispositions précitées. S’il est soutenu que l’arrêté d’autorisation vise irrégulièrement l’avis donné le 22 janvier 2008 par cette collectivité, cet avis, qui ne peut être regardé comme ayant été émis pour l’application des dispositions précitées, se bornait, après avoir rappelé l’intérêt de la société pour le site de l’ancienne carrière, à donner pouvoir au maire pour prendre contact avec les administrations et l’entreprise pour ouvrir ce nouveau site. La prise en considération d’un tel avis n’a dès lors pu avoir aucune influence sur le sens de la décision prise par le préfet de la Haute-Garonne. Il s’ensuit que la circonstance que l’arrêté ait visé cet avis ne saurait entacher l’arrêté contesté d’irrégularité au regard des dispositions précitées de l’article R. 512-20 du code de l’environnement.

13. En quatrième lieu, la copie conforme d’un extrait du registre de délibération d’une collectivité territoriale n’est pas au nombre des actes administratifs soumis à l’obligation de mention du nom et du prénom de leur auteur en application de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions par les copies d’extraits du registre des délibérations de Charlas, Nizan-Gesse et de Sarremezan est inopérant. En tout état de cause, si ces copies ne mentionnent pas le nom et le prénom du maire sous la mention de sa fonction, il n’en résultait aucune ambigüité quant à l’identité du signataire de ces copies notamment eu égard aux mentions relatives à la composition du conseil municipal qui y figurent, ces copies comportant la qualité et la signature du maire.

14. En cinquième lieu, en application de l’article R. 512-6 du code de l’environnement, le dosser de demande doit comporter 7° « Dans le cas d’une installation à implanter sur un site nouveau, l’avis du propriétaire, lorsqu’il n’est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’urbanisme, sur l’état dans lequel devra être remis le site lors de l’arrêt définitif de l’installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ». Il résulte de l’instruction que la société Dragages Garonnais a satisfait à cette obligation en consultant le maire de Montmaurin sur les modalités de remise en état du site et que cet avis a pris la forme d’un visa du maire sur les plans de remise en état. Par suite, le moyen tiré de l’absence d’avis du maire sur la remise en état ne peut qu’être écarté.

15. En sixième lieu, aux termes de l’article L. 515-1 du code de l’environnement, dans sa rédaction alors applicable : « Les exploitations de carrières sont soumises à l’autorisation administrative prévue par l’article L. 512-1 ou à l’enregistrement prévu à l’article L. 512-7… / (…) L’autorisation administrative ou l’enregistrement visé à l’alinéa précédent ne peut excéder trente ans. / Cette autorisation ou cet enregistrement ne peuvent excéder quinze ans pour les terrains dont le défrichement est autorisé en application des articles L. 311-1 ou L. 312-1 du code forestier. Toutefois, lorsque l’exploitation de ces terrains est associée à une industrie transformatrice nécessitant des investissements lourds, la durée de l’autorisation d’exploiter ou de l’enregistrement peut être portée à trente ans, après avis conforme de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites ». Il résulte de l’instruction que la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, réunie le 15 janvier 2009 dans sa formation « carrières », a donné un avis favorable à la demande de la société Dragages Garonnais après avoir été informée par le rapport de l’inspecteur des installations classées des caractéristiques du projet, notamment de la durée d’exploitation de trente ans et de la teneur des équipements nécessités par l’exploitation dont une installation de criblage-concassage. Par suite, la circonstance que la commission n’ait pas elle-même qualifié son avis de conforme est sans incidence sur la régularité de celui-ci.

16. En dernier lieu, aucune disposition du code de l’environnement ne fait obligation au dossier de demande de comporter une notice relative à l’hygiène et à la sécurité du personnel conforme aux dispositions de l’article R. 231-135 du code du travail.

Sur le fond :

17. Aux termes de l’article L. 511-1 du code de l’environnement, dans sa rédaction alors en vigueur : « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d’une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. / Les dispositions du présent titre sont également applicables aux exploitations de carrières au sens des articles 1er et 4 du code minier. ». L’article L. 512-1 du même code dispose que : « Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l’article L. 511-1. / L’autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l’arrêté préfectoral. (…) ». Aux termes de l’article R. 512-28 du code de l’environnement : « L’arrêté d’autorisation et, le cas échéant, les arrêtés complémentaires fixent les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1, L. 220-1 et L. 511-1. ».

18. La circonstance que la carrière soit localisée dans une ZNIEFF ne fait pas par elle-même obstacle à la délivrance d’une autorisation d’exploiter. En l’espèce, l’emprise de la carrière ne représente qu’un très faible pourcentage de cette ZNIEFF et il n’est pas établi que le site de la carrière serait le siège de flore ou de faune protégées, notamment de chiroptères. Il ne résulte pas non plus de l’instruction que l’exploitation de la carrière porterait une atteinte au patrimoine naturel telle que l’autorisation délivrée par le préfet serait entaché d’erreur manifeste d’appréciation ou méconnaîtrait le principe de précaution. Si l’exploitation de la carrière aura pour effet d’accroître le nombre de poids-lourds sur l’itinéraire emprunté par les camions de la société Dragages Garonnais, il résulte de l’instruction que les caractéristiques de la route départementale 633 permettront d’absorber ce trafic supplémentaire. Ainsi qu’il a été dit au point 6 ni la dangerosité de cette route ou de celle de la route départementale 69c qui en outre ne sera emprunté par les camions de la carrière sur environ seulement 450 mètres, ni l’inadaptation de cette dernière au trafic poids-lourds ne sont établies. Il n’est pas davantage établi par l’instruction, notamment par les photographies produites, que la traversée du bourg de Blajan par une partie du trafic poids-lourds induit par la carrière, présenterait une dangerosité telle que l’autorisation serait entachée d’erreur manifeste d’appréciation. Enfin, si l’exploitation de la carrière est source de nuisances sonores pour les maisons d’habitations les plus proches, il résulte de l’instruction que les niveaux d’émergence sonore resteront largement inférieurs aux seuils règlementaires. Par suite, les demandeurs de première instance ne sont pas fondés à soutenir que l’arrêté contesté serait entaché d’erreur manifeste d’appréciation au regard des atteintes au patrimoine naturel, à la sécurité ou à la salubrité publique.

19. Par arrêté du 17 janvier 2008, le préfet de la région Midi-Pyrénées a prescrit la réalisation, sur les phases 1, 5 et 6 du projet de la SARL Dragages Garonnais, un diagnostic archéologique qui a été réalisé au cours de l’été 2010 postérieurement à l’arrêté contesté intervenu le 10 avril 2009. Le rapport dressé par l’Institut national de recherches archélogiques préventives (INRAP) à la suite de cette opération de fouilles mentionne qu’alors même que toutes les entités géomorphologiques ont été appréhendées, toutes les cavités reconnues étaient stériles pour le Pléistocène et que seul un biface partiel acheuléen a été ramassé en surface à proximité du secteur prescrit. Ce rapport ajoute, s’agissant du fonctionnement du karst, que les « études sembleraient démontrer qu’il ne faut pas s’attendre à des éléments archéologiques au cœur du massif », enfin que « il peut être déduit de l’analyse de la base du front de la carrière, et notamment par l’observation de remplissages exclusivement constitués d’argiles laminées, déposées par la rivière alors à ce niveau, qu’ils ne peuvent contenir d’éléments anthropiques ». Par suite les intimés ne peuvent utilement se prévaloir des nombreux articles de scientifiques sur le potentiel espéré de ce site en ce qui concerne la période de la préhistoire, tous antérieurs à la réalisation de ce diagnostic, pour soutenir que l’autorisation de carrière serait entachée d’erreur manifeste d’appréciation.

20. Le diagnostic archéologique a, cependant, mis au jour les vestiges d’un ensemble fortifié, attribuable vraisemblablement à la fin du XIIème siècle- début du XIIIème siècle, dans un état de conservation assez inégaux, certains étant particulièrement détériorés. Le rapport de diagnostic, dans son paragraphe 3.4 « synthèse de l’occupation médiévale », mentionne notamment que « les nombreuses informations recueillies au sein des tranchées ont permis de révéler un site médiéval complexe et inédit » et que « l’arasement du site n’étant pas documenté en archives, seul un décapage total de la surface serait à même de proposer une photographie du site à sa destruction. En outre cela permettrait de relever d’autres empreintes liées à l’aménagement du site. ». En conclusion, le rapport indique que « les zones préservées ont révélé des éléments mobiliers et architecturaux ayant peu de parallèles pour cette période dans le toulousain. Ils éclairent d’un jour nouveau le système féodal du Nébouzan à la veille du traité de Corbeil (1258) » (…) « les éléments découverts au sud du promontoire, dans la doline, ainsi que dans la périphérie du site, contemporains de l’occupation, étendent la zone médiévale à près de 6 000 m² », « Avec plus d’un demi-hectare de superficie, pour la partie reconnue, le site médiéval du Castet à Montmaurin apparaît, malgré un état de conservation inégal, comme une source d’information importante pour une période dont la connaissance reste encore particulièrement lacunaire ». Il résulte ainsi de l’instruction que le projet d’exploitation de la carrière porte atteinte à la conservation d’éléments du patrimoine archéologique qui est au nombre des intérêts visés à l’article L. 511-1 précité du code de l’environnement. Par suite, en application des dispositions précitées de l’article L. 512-1du même code l’autorisation d’exploitation ne pouvait être délivrée que si ces inconvénients pouvaient être prévenus par des prescriptions adaptées. Dés lors, l’arrêté du préfet du 10 avril 2009, qui autorise l’exploitation de la carrière sans l’assortir de prescriptions de nature à prévenir les atteintes à la conservation des vestiges médiévaux découverts lors du diagnostic archéologique est, sur ce point, entaché d’erreur manifeste d’appréciation.

21. Cependant, aux termes de l’article L. 514-6 du code de l’environnement, les décisions, prises sur le fondement de l’article L. 512-1 de ce même code, accordant ou refusant une autorisation d’exploiter une installation classée pour la protection de l’environnement sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. Lorsqu’il statue en vertu dudit article L. 514-6, le juge administratif a le pouvoir, après avoir si nécessaire régularisé ou complété la procédure, d’autoriser la création et le fonctionnement d’une installation classée pour la protection de l’environnement en l’assortissant des conditions qu’il juge indispensables à la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 511 1.

22. Ainsi qu’il a été dit au point 20, des vestiges archéologiques ont été découverts postérieurement à l’enquête publique, dans le cadre du diagnostic archéologique prescrit par le préfet de la Haute-Garonne le 17 janvier 2008. Alors que ce diagnostic concernait les parcelles incluses dans les phases 1, 5 et 6 de l’exploitation, les seuls vestiges qui ont été mis au jour ont été découverts dans les parcelles incluses dans la phase 1. Il résulte de l’instruction que l’exclusion de toute mise en exploitation des parcelles incluses dans cette phase 1 est nécessaire pour préserver ces vestiges dans leur état initial. Il résulte également de l’instruction qu’une telle limitation n’a pas pour effet d’aggraver l’impact de la carrière tant en ce qui concerne son insertion dans le paysage, que l’écoulement des eaux, la protection de la faune, ou encore les nuisances sonores ni ne fait obstacle à la remise en état des parties exploitées après cessation de l’activité. Dans ces conditions et sans qu’il soit nécessaire qu’une nouvelle enquête publique soit organisée il convient, comme le demande subsidiairement la société requérante, d’exclure du périmètre de l’exploitation autorisée, les parcelles situées dans les limites de la phase 1 telles que ces limites sont reportées sur le plan de phasage en annexe 3 de l’arrêté préfectoral contesté.

23. Il résulte de tout ce qui précède que la société Dragages Garonnais est fondée à demander l’annulation du jugement du 24 octobre 2013 et qu’il y a lieu de faire droit aux conclusions de cette société tendant à ce que soit prescrite l’exclusion des parcelles de la phase 1 de l’emprise de l’exploitation autorisée.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

24. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Dragages Garonnais qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance les sommes demandées par l’association de défense et de l’amélioration de la qualité de la vie en vallée Save et de Gesse (ADAQ-VIE), M. et Mme L==, M. et Mme M==, M. et Mme D== et M. M==, et par l’association « Entre Save et Seygouade », Mme M== et Mme M== au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par la SARL Dragages Garonnais.

DECIDE

Article 1er : L’intervention de l’association Nature Comminges est admise.

Article 2 : Le jugement n° 0902766 et 0904248 du 24 octobre 2013 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 3 : L’arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 10 avril 2009 est modifié comme suit : « Article 1 : La SARL Dragages Garonnais dont le siège social est situé 27 avenue Saint-Jean à Valentine (31800) est autorisée à exploiter une carrière de calcaire et une installation de criblage-concassage sur le territoire de la commune de Montmaurin. / L’autorisation porte sur les parcelles 1 et 2 (partiellement) de la commune de Montmaurin section B1 du plan cadastral, tel que reporté sur le plan en annexe 1 du présent arrêté à l’exclusion des parcelles incluses dans les limites de la phase 1 telles que reportées sur le plan de phasage en annexe 3 du présent arrêté. ».

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5: Les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative par l’association de défense et de l’amélioration de la qualité de la vie en vallée Save et de Gesse (ADAQ-VIE), M. et Mme L==, M. et Mme M==, M. et Mme D== et M. M==, et par l’association « Entre Save et Seygouade », Mme M== et Mme M== sont rejetées.