Article L.332-8 du Code de l’urbanisme
« Une participation spécifique peut être exigée des bénéficiaires des autorisations de construire qui ont pour objet la réalisation de toute installation à caractère industriel, agricole, commercial ou artisanal qui, par sa nature, sa situation ou son importance, nécessite la réalisation d’équipements publics exceptionnels.
Lorsque la réalisation des équipements publics exceptionnels n’est pas de la compétence de l’autorité qui délivre le permis de construire, celle-ci détermine le montant de la contribution correspondante, après accord de la collectivité publique à laquelle incombent ces équipements ou de son concessionnaire. »
1) Le caractère propre
Le régime dit des équipements exceptionnels existait antérieurement à la loi SRU du 13 décembre 2000. Il demeure inchangé par la loi du 2 juillet 2003, urbanisme et habitat.
La participation pour le financement d’un équipement public exceptionnel constitue un produit local liquidé au vu du permis de construire et recouvré comme en matière d’impôts directs selon les modalités définies par la circulaire n°92-77 MO du 29 juin 2990 de la direction de la comptabilité publique.
Lorsqu’un demandeur sollicite un permis afin de construire une installation à caractère professionnel, une contribution au titre du financement des équipements ne peut lui être réclamée que dans la mesure où lesdits équipements présentent un caractère « exceptionnel ». Les équipements doivent être nécessaires.
Pour le ministère de l’Equipement, les équipements à prendre en compte seraient ceux « exclusivement » nécessités par l’installation projetée (cf circulaire n° 2001-56 du 27 juillet 2001 relative à la réforme des contributions d’urbanisme issue de la loi du 13 décembre 2001).
« Considérant que, par les articles 2 et 3 de l’arrêté attaqué, le maire d’Orgeval a décidé d’exempter les travaux pour lesquels la société Lévitan avait sollicité le permis de construire de la taxe locale d’équipement et de l’assujettir au versement d’une participation aux dépenses d’équipement de 652 409 F ; qu’il n’est ni établi ni même allégué par la COMMUNE D’ORGEVAL que ces travaux, consistant dans la transformation d’un garage en magasin de vente, nécessiteraient la réalisation d’équipements publics exceptionnels ; que, dès lors, le maire d’Orgeval n’a pu se fonder sur l’article 1586-C-IV précité, pour exempter la société Lévitan de la taxe locale d’équipement et lui demander une participation dont il n’était au surplus, pu compétent pour fixer le montant ; […] » CE, 13 mars 1992, Cne d’Orgeval, n°107.331).
Il faut que l’équipement soit réellement exceptionnel (ce qui n’est le cas ni d’un feu tricolore, ni de l’aménagement d’un croisement en T pour le transformer en croisement en X, arrêt du CE 27 avril 1998, SA GCR-Emin et CAA de Nancy 5 février 1998, Cne de Lezennes et 2 avril 1998, SNC LIDL), et soit complètement spécifique à l’unité foncière dont la participation financière est requise (CE, 18 mars 1983, M. et Mme Plunian : les travaux de viabilité portant sur une portion de chemin communal longeant le lotissement et en constituant l’un des accès, mais étant également affecté à la circulation générale ne peut être considéré comme un équipement propre : jurisprudence constante).
« Considérant que la commune justifie la participation litigieuse en faisant valoir qu’elle envisageait de réaliser, au moment où le permis de construire a été délivré, un aménagement du carrefour entre la rue Sombardier et l’avenue Duhamel comportant, pour l’essentiel, l’implantation d’un feu tricolore et des aménagements de voirie devant faciliter l’accès des véhicules en provenance de l’avenue Duhamel qui tournent à gauche dans la rue Sombardier ; que de tels travaux ne peuvent être regardés comme des équipements publics exceptionnels au sens des dispositions précitées de l’article 332-8 du Code de l’urbanisme, mais on le caractère d’aménagements courants de voiries […] » (CAA Nancy, 2 avril 1998, SNC LIDL, n°95NC00819).
« Considérant, […], qu’il ne résulte de l’instruction ni que l’aménagement d’un carrefour sur la route départementale n°55 bis, afin de permettre la desserte du lotissement industriel et commercial comportant 12 lots, d’une superficie totale de 56 876 m², ne constituerait pas un équipement public exceptionnel, au sens de l’article L.332-8 du Code de l’urbanisme, ni que la participation spécifique exigée à ce titre à la SCI Le triangle présenterait un caractère excessif ; […] » (CAA Nancy, 5 février 2004, SCI Le Triangle, n°98NC00640).
Il semble que si l’équipement public n’a pas un caractère totalement exceptionnel et n’est pas situé sur le terrain de l’unité foncière le finançant, il ne pourra être considéré comme un équipement propre.
Dans ce cas, comme dans tous les cas ou une contribution d’urbanisme indue est versée par le bénéficiaire d’une autorisation de construire, les taxes ou contributions obtenues sont réputées sans cause. Les sommes versées sont sujettes à répétition (l’action en répétition se prescrivant par cinq ans à compter du dernier versent ou de l’obtention des prestations indûment exigées), aux termes de l’article L. 332-30 du code de l’urbanisme.
Rappelons que la circulaire ministérielle du 27 juillet 2001 précitée a pour sa part précisé que des réseaux rendus nécessaires par l’implantation de bâtiments d’exploitation agricole, y compris le logement de fonction des exploitants, peuvent justifier le recours à l’article L 332 8 du Code l’urbanisme.
Ajoutons qu’une réponse ministérielle précise que le régime de l’article L 332-8 ne peut être utilisé « pour la desserte d’une construction d’habitation isolée qui ne serait pas liée à une exploitation agricole ». Plus intéressante, constitue la précision selon laquelle « les bâtiments agricoles qui seraient implantés dans un secteur constructible soumis à la participation pour voie nouvelle, (…) seraient, lors de la délivrance des permis de construire, associés au financement des équipements publics de la nouvelle voie dans les mêmes conditions que les autres propriétés riveraines de la voie nouvelle » (Rép. min. à Dulait, n° 34498, JO Sénat 13 septembre 2001, p. 2989).
2) Les critères du caractère exceptionnel
A s’en tenir aux dispositions légales, le caractère exceptionnel des équipements publics doit être co-substantiel de l’installation professionnelle proprement dite, puisque la rédaction de l’article L 332-8 précité mentionne que c’est la nature, la situation, ou l’importance de ladite installation qui nécessite de tels équipements. Dans la pratique, tout sera cas d’espèce.
« Considérant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction projetée par la société Prehel et fils ne nécessitait, ni par sa situation, ni pas son importance, la réalisation d’équipements publics exceptionnels […] » (CE 18 févier 1978, Ville de Rambouillet, n°97155).
« Considérant qu’il résulte de l’instruction de que la construction réalisée par M. Van de Maele ne nécessitait ni par sa situation, ni pas son importance, la réalisation d’équipements publics exceptionnels […]. » (CE 22 juin 1987, Van de Maele, n°69.759, n°69.796).
« Considérant, […], qu’en vertu des articles L.332-12 et L.332-8 du Code de l’urbanisme, […] ; que les incidences prévisibles que le projet de lotissement à vocation commerciale et de services devait avoir sur les conditions de circulation pouvaient légalement justifier de mettre à la charge du lotisseur une telle participation ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que l’opération de lotissement ait été détournée de son objectif d’aménagement urbain et qu’en l’espèce la participation spécifique demandée ait constituée le mobile de l’autorisation contestée ; […] » (CAA Bordeaux, 2 mai 1995, M. Voglimacci, n°93BX00756 et 93BX00835).
On note également dans la jurisprudence d’autres critères permettant d’évaluer le caractère exceptionnel de l’équipement : sa localisation, son importance et son coût.
S’agissant de travaux d’aménagement d’un carrefour sur lequel débouche la voie d’accès au terrain d’assiette du lotissement. « Considérant que si les travaux susévoqués ont eu pour effet d’améliorer les conditions d’accès du nouveau lotissement, ils ne peuvent être regardés, eu égard à leur localisation, leur importance et leur coût, comme se rapportant à la réalisation d’équipements publics exceptionnels au sens des dispositions précitées de l’article L.332-8 du Code de l’urbanisme, et constituent des travaux d’aménagement courant de la voie existante ; […] .» (CAA Nancy, 5 févier 1998, Cne de Lezennes, n°94NC01306).